Quatrième œuvre de Shakespeare que je dévore d'un coup, comme pour les 3 précédentes ( Macbeth, Richard III, Hamlet), je me vois obliger de rappeler le principe. Néophyte total dans l’œuvre du dramaturge anglais, j'ai eu envie d'enfin passer ce cap et de lire 5 pièces plus ou moins emblématiques. Le tout en y portant le regard le plus neuf possible, le plus démuni, le plus ignorant même, en le revendiquant et en mettant sur Senscritique mes impressions à chaud, d'un ignorant qui lutte contre sa propre ignorance.
Je ne cherche pas à avoir une vision globale, à voir des détails techniques ou quoique ce soit. Je me laisse embarquer, avec ma petite culture, mon petit entendement, ma petite intuition et je vogue sur le bateau de Shakespeare. Pour l'instant les escales ont été du bon vers le meilleurs, puisque chaque pièce m'a comblé de plus en plus.
Craignant de m'enfermer de manière naïve dans les tragédies, j'ai décidé de renoncer à Othello et au Roi Liar pour terminer mes 5 pièces avec deux comédies. Après de vifs conseils, je me suis laissé tenter par La Nuit des Rois, mon avant-dernière pièce de ce cycle shakespearien que je m'impose à moi-même (pour la petite histoire, après, je retourne à Heidegger, donc autant vous dire que je savoure clairement le style de l'anglais).
Je fais donc le grand écart stylistique, passant de la folie sombre et déshumanisé (ou surhumaine?) de Hamlet pour le rire et la farce de la Nuit des Rois. Ignorant tout de cette pièce, je fut ravis de voir un style vivant, dynamique où l'on sent presque l'alcool s'échapper des répliques de Sir Toby et Sir Andrew. L'idée du travestissement m'a également ravi, la trouvant particulièrement intéressante.
Le sujet, également, m'a assez plu. Viola, amoureuse du Duc Orsino, se travesti pour pouvoir être près de lui, en qualité de page. Malheureusement, Orsino est fou amoureux, pour sa part, de la comtesse Olivia. Or, Olivia ayant perdu son père et son frère dans l'année, refuse de répondre à son amour.
Orsino va donc demander à Cesario (Viola travesti) de lui dire tout l'amour du Duc. Mais les choses ne marchent pas comme prévu et c'est de Cesario qu'Olivia s'éprend.
Dans le même temps, Sebastien, le frère jumeau de Viola, que cette dernière croit mort, arrive dans cette cité d'Illyrie.
La pièce est ponctué par les facéties de la cours de la Comtesse. Sir Toby, son oncle, alcoolique, tente de la mettre avec Sir Andrew, un autre ivrogne des plus stupides. Les deux, avec un troisième homme, Fabien, s'amuse et se moque de Malvolio, l'intendant de la Comtesse, et avec l'aide de Feste, le clown et de Maria, la servante, vont trouver un moyen de le tourner en ridicule.
Dire que je n'ai pas accroché serait la moindre des choses. Si le style littéraire m'a beaucoup plus et si, plus d'une fois j'ai rit, notamment vis-à-vis des farces de Toby, Andrew, Maria et Feste, je n'ai pas du tout accroché à l'humour plus développé et à quelques calembours.
Le mélange de la comédie avec son récit principal (ponctué par le retour de Sebastien) et de la farce dont Malvolio est la victime, rend la narration peu séduisante à mon goût et, bien qu'on ne se perde jamais, on a du mal à s'intéresser aux histoires d'amours, censées être centrales pourtant.
J'ai trouvé les personnages du premier plan assez peu intéressant, bien que le premier échange entre Viola et la Comtesse soit intéressant, la suite montre des personnages dont l'esprit n'est peut être pas des plus fins. Le plus malin semblant être Feste qui rit des gens et joue des mots.
Globalement j'ai été peu convaincu, la profondeur de la farce étant absente quant aux personnages du récit principaux, ils me semblaient superficiels et sans saveur.
A partir de l'acte IV, la pièce s'emballe et joue sur le quiproquo entre Viola et Sebastien, mais malheureusement, ceci est trop prévisible et bien peu intéressant dans l'exploitation. Ca amène un final sans saveur où les mariages s'enchainent à une vitesse folle, rendant les personnages encore plus creux. Les déclarations d'amours se faisant tellement gratuitement que la poésie de Shakespeare m'a semblé relativement absente lors de celles-ci.
Il y a bien sur des choses que j'ai aimé : on rentre facilement dans l'histoire, il y a des moments vraiment drôles, de très bons dialogues. Mais malgré tout, cela n'est pas parvenu à me convaincre.
C'est donc une véritable déception qui s'empare de moi, car oui, je n'ai pas été accroché outre mesure. Dur à imaginer, car on parle quand même de Shakespeare. Serais-je allergique aux comédies du dramaturge ? La prochaine pièce répondra peut être à cette question.