J’ai une certaine affection pour Catherine Millet parce qu’elle s’en est prise plein la gueule suite à ses interventions télévisées après son opposition à Balance ton Porc. Fallait voir la tête des chroniqueurs du Quotidien devant ses propos, on aurait dit qu’une connexion pétait dans leur cerveau, c’était magique.
Concernant le livre, le plus grand mystère, c’est sa raison d’être. Pourquoi a-t-il été écrit ? Catherine s’explique en préface, mais sa réponse n’est pas claire. Ce n’est pas un livre érotique, on le comprend très vite. Ce n’est pas une provocation. Ce n’est pas non plus un essai sur le sexe qui voudrait produire des généralités. C’est plus un témoignage d’une vie sexuelle hors du commun, la sienne. On n’y trouvera rien pour soi. C’est un livre narcissique qui ne s’en cache pas. Catherine aimait être le centre d’attentions des partouzes et, en écrivant ce livre, a de nouveau réussi à braquer les regards sur elle et sur son sexe. Au moins le titre ne ment pas. Donc la démarche me plaît, mais le résultat moins.
La démarche, c’est une liberté sexuelle menée jusqu’au bout. Un livre de cul sans réel objet, dans lequel Catherine clame haut et fort son amour pour la baise. Faut du courage quand on est une femme.
Le résultat en revanche, c’est une analyse un peu froide de ses pratiques, comme on examinerait une sculpture d’art. D'ailleurs, les supports de réflexion et les outils lexicaux sont ceux d’une critique. C’est à dire que c’est aussi chiant à lire qu’un truc arty qu’on pourrait trouver dans de la littérature spécialiste. Est-ce que d’ailleurs, ce n’est pas ça la plus grosse blague de ce bouquin ? Catherine écrit un livre de cul, tout le monde se rue dessus, et bim ! En fait c’était un piège : le livre est chiant comme la pluie.
C’est souvent ampoulé c’est vrai, mais d’un autre côté, ce n’est pas inintéressant non plus. Disons que c’est un objet trop curieux pour laisser indifférent - toutefois, ils sont nombreux ceux qui ont été laissés dans l’indifférence, précisément parce que le livre n’est ni excitant, ni passionné, ce que je peux comprendre. Après j’ai envie de dire : qu’un livre n’entre pas dans la case que vous lui avez assigné, n’en fait pas nécessairement un mauvais livre. Pourquoi une femme qui écrit sur le sexe devrait-elle obligatoirement être sensuelle ?
Bref, c’est un truc indéfinissable qu’on ne peut pas vraiment défendre puisqu’on n’en comprend même pas l’utilité. Les épisodes de cul se bousculent, Catherine a absolument tout essayé, et c’est comme si elle se lançait dans une psychanalyse d’elle-même en décortiquant chaque pratique, depuis la levrette jusqu’au léchage d’anus. On lit le truc, on se dit : “Ok Catherine t’as vraiment peur de rien”. Et c’est pour ça précisément que j’ai une certaine admiration pour la dame.