La lecture du prologue nous plonge dans un univers à la Barry Lyndon,ici un obscur cavalier suédois qui s’en va à la guerre, au désespoir de sa fille. Quelques indications plus mystérieuses laissent néanmoins présager un autre récit.
Celui-ci débute réellement, si on peut dire par l’ histoire d’une rencontre, celle de Pied-de-Poule, voleur de son état, et d’un jeune fat dont je tairai le nom et qui prétend vouloir rejoindre les armées de son roi…de Suède. Jusqu’ici vous suivez bien? Si je vous révèle ne serait-ce que la suite, je suis un criminel, car comme le dit Borges, Perutz est un « Kafka aventureux », et vous serez transporté par les péripéties et les renversements de situation qui vont se succéder. Ce livre me rappelle aussi un film formidable autant que méconnu La Vallée Perdue , avec lequel il partage une formidable perspicacité sur l' âme humaine. Par ailleurs, la question de l’ identité est essentielle et source d’inquiétude autant que de fantastique.
Enfin, et je m’en voudrais de ne pas le dire tout net, sous ses dehors de conte fantastique adroitement écrit, se joue un drame humain, une histoire d’amour parmi les plus belles que j’ai pu lire…
Pour les connaisseurs, Perutz a toute la subtilité et la finesse de ces auteurs juifs austro-hongrois qui ont vu un monde s 'effondrer, mais là où Zweig finit par choisir le suicide, Perutz choisit la Palestine encore sans mandat anglais, sans jamais rompre totalement avec les paysages de sa jeunesse.... Et pour ceux qui douteraient de sa connaissance de la guerre en arrière-plan du livre, il revint de la première guerre mondiale avec deux côtes en moins, allégé aussi de ses illusions....?