Au début du XVIIIème siècle, l’Europe est ravagée par la Grande guerre du Nord, mettant aux prises la Suède et la Russie, ainsi que plusieurs territoires du Saint Empire germanique. Quelque part en Silésie, perdus dans la neige, deux hommes tentent de gagner la frontière polonaise pour échapper aux Dragons de l’Empire. L’un d’eux, Christian von Tornefeld, est un noble suédois qui a déserté afin de rejoindre les armées de son roi. Quant à l’autre, il n’a pas de nom ; c’est un vulgaire voleur menacé du gibet. Ces deux fuyards que tout oppose deviennent pourtant d’inséparables compagnons de malheur. Mais un jour, comme ils sont torturés par le froid et la faim, ils tombent sur un vieux moulin en ruine. On dit que le meunier s’est suicidé ; pourtant il est là, tout de rouge vêtu, invitant les fuyards à se restaurer. A moins que ce ne soit son spectre… Cette rencontre est le véritable point de départ de l’aventure. Sous l’influence du démon, ou d’une convoitise tout humaine, le voleur décide d’envoyer son compagnon à la mort pour usurper son identité. Il sera désormais le Cavalier suédois, un officier gentilhomme, vivant sur les terres qu’il a dérobées au véritable Tornefeld. Mais parviendra-t-il à tromper Maria Agneta, la fiancée de son rival ? Après une formidable ascension et sept années de bonheur, le voleur de vie devra payer son crime au prix fort.
Ce grand roman d’aventures est aussi un thriller où Perutz manie le fantastique avec subtilité. L’atmosphère y est sombre, inquiétante, comme un paysage hivernal de Brueghel. C'est une histoire de double et sans doute une réflexion sur le destin. Le pacte avec le diable, la magie, la substitution d’identité sont autant de thèmes récurrents dans l’œuvre de Perutz. Au fil des pages, on découvre aussi une magnifique histoire d’amour, basée sur un malentendu - thématique réutilisée dans "La nuit sous le pont de pierre". Mais le sentiment le plus poignant du récit est sans doute l’amour qui unit le Cavalier suédois à sa fille. Perutz s’est encore une fois inspiré de faits historiques – la disparition du père de Maria Christine von Blohme – pour créer un chef d'œuvre, un roman onirique, aussi puissant que mystérieux!