Roman de l'attente et de son absurdité, de l'orgueil et de sa vanité, le Désert des Tartares avaient tous les atours de ma perfection littéraire. Et pourtant...
Séduit par le style de Buzzati, je lui reconnais de nombreux talents : celui d'écrire avec une jolie langue, classique mais belle, celui d'écrire des scènes mémorables (le destin d'Angustina est un superbe morceau de bravoure), celui d'écrire sur l'attente et sur la déception sans jamais ennuyer ni alourdir son récit, celui de planter un décor et de nous en faire ressentir tous les aspects avec une maitrise indéniable du sensuel, du sensoriel. C'est un excellent artisan qui utilise les mots pour fabriquer ce dont son histoire a besoin. Et pourtant...
Et pourtant, la lecture de ce que l'on m'avait vendu comme un monument ne m'a pas rassasié, surtout dans ses derniers chapitres. Et si je comprends ce qu'a voulu y faire Buzzati, j'ai regretté ce choix narratif et cela a en partie gâché mon plaisir de lecture.
En prenant un peu de recul, j'ai malgré tout le sentiment que c'est là encore une preuve de la maitrise de Buzzati qui fait de son roman l'objet d'une commune déception pour son personnage comme pour son lecteur. Et Il faut bien en convenir être "déçu" avec la manière est un sentiment que je souhaite à tout le monde.