Comme chacun sait, il n’y a pas de parents parfaits et on ne peut seulement qu’espérer en être un bon ou un pas trop mauvais. Nous avons tous été plus ou moins ratés par nos géniteurs et sommes voués à répéter les mêmes erreurs. Nous ne pouvons que faire de notre mieux. Joie ! Mais même si certains parents ne sont sont que plus ou moins bons, certains sont ben et bien catastrophiques. Le père de Kafka est de ceux-là.
Ayant fondé sa fortune avec l’ouverture d’un magasin, il était convaincu de n’avoir rien à apprendre de ses proches, car savait déjà tout et il se démenait sans cesse pour que ces enfants ne manquent de rien. Contrairement à son père qui avait manqué de tout, Kafka a grandi dans la souffrance par comparaison avec son géniteur.
Cette lettre est bien plus qu’un simple texte à son père. C’est le constat d’un échec dû à une vie familiale mal gérée. Tout au long de la lecture, on sent une relation profondément ambigüe entre le père et le fils. Ils s’aiment mais n’ont jamais put se le dire. D’un côté, l’auteur raconte que lors d’une grave maladie son père le regardait uniquement du coin de l’œil derrière la porte et donnait uniquement de petits gestes de la main, parce qu’il refusait de de montrer en état de faiblesse. De l’autre côté, Kafka écrit un texte long de plusieurs dizaines de pages qui ne sera jamais lu par son destinataire. C’est donc un drame familial auquel nous assistons le long des pages.
Les deux hommes n’ont jamais put avoir une discussion et se sont enfermés dans un profond mutisme par refus de montrer leurs faiblesses. Ces démonstrations constantes de virilité au lieu de les renforcer n’ont fait que les affaiblir. Le père camoufle sa frustration en attitude de tyran qui refuse de confronter à la culpabilité et se protège par une mauvaise foi et une hypocrisie, afin de ne se jamais se remettre en question. Le fils se mure dans le silence des livres et des textes, afin de pouvoir enfin exprimer sa rage intérieure et en même temps, il ne parle pas, notamment de la maladie qui le ronge.
Leurs volontés de ne jamais vraiment discuter à coeur ouvert mènera à la disparition de leur famille. Franz Kafka est mort en 1924 de la maladie qui le tue depuis son enfance et qu’il a refusé de faire soigner pour ne pas montrer sa faiblesse. Hermann Kafka est mort en 1931 avec la mort de trois fils sur la conscience (deux en bas âge et puis Franz).