Bordel que c'est long. Probablement pas plus que le Voyage au bout de la nuit, mais va comprendre, ici, c'est long et chiant. Surtout chiant, en fait.
Comme dans son premier roman, Céline met en scène son personnage (Ferdinand, mais il n'est jamais nommé Bardamu) à la première personne, avec un vocabulaire très "oral" (et parfois incompréhensible pour le lecteur du XXIème siècle).
(je vous préviens, je ne vais pas arrêter de comparer les deux romans, pour la simple raison que j'ai adoré le Voyage au bout de la nuit qui fut ma porte d'entrée vers Céline et m'a donné envie de me plonger dans Mort à crédit... qui sera plutôt ma porte de sortie tant j'ai été déçu...)
Là où le Voyage décrit le monde de l'après-guerre, il vise d'une certaine façon (au moins dans sa première partie) à l'universel, à décrire des sociétés, à ouvrir l'horizon du lecteur, Mort à crédit fait l'inverse. Est-ce parce qu'il s'attarde sur des individus mesquins ? Est-ce parce qu'il est vu au travers d'un enfant ? Difficile à dire, d'autant qu'on perçoit quand même, ici ou là, le progrès qui déboule dans les rues de Paris... En tout cas, on voit des tranches de vie par le petit bout de la lorgnette, et c'est bien souvent dégueulasse, parfois sordide et toujours extrêmement cru. Ce n'est pas le dernier point qui me dérange, mais plutôt le premier. Si le récit ne saurait mieux illustrer le titre, la plupart des protagonistes passent leur vie à courir après l'argent et devant leurs dettes, ce n'est pas cet aspect-là que j'en ai retenu.
Voir le quotidien de Ferdinand chez ses parents, avec son père ignoble, avec un Courtial irresponsable, des personnages féminins forts mais soumis (c'est curieux écrit comme ça... mais ça reflète bien ce que je veux dire), c'est presque insupportable - peut-être parce que la maltraitance que subit le jeune homme me touche bien plus ? Peut-être aussi parce que c'est franchement répétitif ? Peut-être aussi qu'on a du mal à s'identifier à Ferdinand (un enfant puis un jeune ado, dans un monde finalement très étranger au nôtre, avec des réactions complètement déraisonnables même pour un enfant comme dans la pension anglaise) ?
Pour finir : la deuxième partie, avec Courtial des Pereires se lit nettement mieux que la première. Je n'irais pas jusqu'à dire que ça en sauve l'œuvre, mais ça laisse sur un sentiment un peu plus mitigé.
En bref, inutile de se plonger à l'aveugle dans Mort à crédit si on a apprécié le Voyage au bout de la nuit, on y retrouvera nettement plus l'ambiance de la fin de ce dernier roman (à partir du retour en France) et en bien plus sordide. Je n'irais pas jusqu'à dire que j'en regrette la lecture, car c'est une sorte de témoignage de la vie parisienne à la Belle Époque, mais je suis ne suis pas du tout mécontent de pouvoir passer à autre chose.