On reconnaît bien la signature d’Arthur Miller dans cette pièce, tant au niveau du thème que du style. L’anti héro tragique que nous retrouvons, Willy Loman, est un homme ordinaire appartenant à la classe moyenne, échouant son ambition ordinaire de vivre le rêve américain.
Les personnages occupent une place centrale dans les pièces de Miller, plus encore que le scénario. C’est à travers eux, à travers leurs luttes internes, et leur psychologie complexe que Miller dépeint des problèmes sociétaux tels que la course à l’efficacité, le délaissement de ceux qui n’arrivent pas à s’adapter, la primauté du paraître, l’abandon, les relations familiales chaotiques …
Miller est particulièrement doué pour développer la psychologie complexe de ses personnages. La déchéance et la folie de Willy nous heurtent de plein fouet, grâce à des flashbacks qui interviennent dans le présent, et ce sans aucun préavis ; mais également à travers des dialogues bien menés où l’on perçoit toute l’ampleur du déni de réalité dans lequel il a construit sa vie. Ayant lu la pièce en VO, les flashbacks m’ont un peu posé problème au début, car ils ne sont absolument pas clairs, et c’est tout le reproche que je pourrais faire à la pièce. Mais on finit par s’y faire.
Comme d’habitude avec Miller, toute la pièce se fonde sur un mensonge, une illusion ; et la vérité n’éclate qu’aux derniers instants, nous plongeant dans la stupeur. Le dénouement est rapide, car ce n’est pas lui qui compte vraiment, mais tout le chemin, toute la lutte pour en arriver là.
Tous les personnages sont tragiques, chacun à leur façon ; et l’épilogue, véritable bouquet final est à la hauteur de la pièce.
« I made the last payment on the house today. Today, dear. And there’ll be nobody home. A sob rises in her throat. We’re free and clear. Sobbing more fully, released. We’re free. Biff comes slowly towards her. We’re free … We’re free … »