(Non, je ne compte même pas m'excuser pour ce titre)

Nick Cave pourrait être le type le plus énervant du monde quand on y réfléchit : auteur-compositeur-interprète de talent, scénariste doué (The proposition), il porte bien la moustache et quand il écrit un livre, vous avez du mal à en décrocher les yeux malgré le dégoût que certains passages sont susceptibles de causer…

Car ouais, ne nous cachons pas les choses : ce livre est aussi drôle, que poétique, que dégueu, que frappant… On suit le déclin de Bunny Munro, démarcheur à domicile pour une marque de cosmétiques, et Bunny c’est… Comment dire ? Le type de prime abord pathético-rigolo. Mais si, vous savez, celui qui porte une chemise aux motifs improbables, une cravate qui l’est encore plus, il a une coiffure qui fut au top de la mode, oui, mais il y a 20 ans, et le pathétique vient du fait que ce mec là se prend pour le Dom Juan ultime, un séducteur irrésistible, le Julio Iglesias de la ménagère en manque de crème pour les mains (et pas que). Un Jean-Claude Convenant plus sombre, plus déjanté et à peine plus cool, si vous voulez. De loin. Z’êtes myopes ? C’est pas mon problème.

Donc ce brave Bunny, loser patenté, délaisse tant et si bien sa femme que plutôt que de continuer à rester suspendue au téléphone à attendre ses appels, elle trouvera plus raisonnable de se pendre tout court dans la chambre maritale, laissant à son trop chaud lapin de mari le loisir de se charger de leur fils de neuf ans, Bunny Junior. Chaud lapin c’est un euphémisme pour addict au sexe, à l’alcool, aux tentatives pour croire encore un peu à tout le baratin qu’il débite. Tout à fait, c'est à ce genre de type qu'incombe désormais la charge d'élever un enfant. Vous les voyez venir vous aussi, hein, les complications futures ?

Et v’là leur étrange road trip qui démarre, Bunny avec sa liste de clientes à aller satisfaire (hum hum), Bunny Junior qui n’en finit plus d’attendre son père dans la voiture avec pour seule compagnie son encyclopédie et les douleurs aux yeux dues au fait qu’il n’ose pas quémander à son héros, son cher papa adoré, de lui acheter du collyre. Car Bunny Jr est un gentil garçon, oh ça oui, et il voit bien que son père a coulé deux trois fusibles alors, il ne veut pas en rajouter. En fait, c’est l’un des points du récit les plus… touchant dirons-nous, ce petit gamin là, il est gentil, cultivé, calme, avec tout ça il n’en est même pas tête à baffe, et on a l’impression que ce gros couillon de Bunny Senior ne se rend même pas compte qu’il a un fils formidable. Non. Lui tout ce qui l’intéresse, c’est de sauter sur tout ce qui bouge / dit oui / semble dire oui (Bunny ne lésine pas sur le whisky, ce qui peut occasionner quelques quiproquo embarrassants) en pensant au vagin d’Avril Lavigne ou au cul lamé or et paillettes de Kylie Minogue chantant à tue-tête « Spinning around » (ah oui, c’est le boxon dans la tête de notre Bunny, z’êtes prévenus).

On sait dès le départ que ça va mal se finir, on sait dès le départ que l’on devrait arrêter la lecture si l’on ne veut pas se prendre le monde glauque de Bunny Munro en pleine face, mais on sait aussi dès le départ que l’on a à faire à une œuvre, de qualité certes, mais surtout, qui possède une vraie personnalité, celle de son auteur. Mais si vous savez, le type agaçant mais sans l’être, qui marche comme Aldo Maccionne dans certain de ses clips…

Cette critique est assez décousue, j’vous l’accorde… A l’image du livre un peu. Par moment. Mais ça fait son charme. Aussi.

Puis merde ! Ce type doit dire le mot vagin toute les deux pages, je m’en vais pas vous vendre ça avec de jolies expressions fleur bleue, j’vous dis pas le choc des contrastes sinon.

Puis merde ! ² J’suis en train de mater le clip de « CETTE PUTAIN DE CHANSON » dixit Bunny. Celle de Kylie, oui. Pour comprendre, enfin tenter, ce qu’il lui trouve (à la chanson, pour ce qui est du contenu du short, j’ai compris où se situe l’intérêt, m’oui m’oui)…

Tout ça pour dire que lire Nick Cave mène à tout. Et n’importe quoi, oui, surtout.
Pravda
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le 8 juil. 2013

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Pravda

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