Grand succès de librairie doublé d'une presse enthousiaste, j'avoue que j'attendais beaucoup de ce livre, surtout au vu d'un sujet que je connais (très) mal : les génocides rwandais et burundais ayant sévi dans les années 90, ici racontés à hauteur d'enfant. Malheureusement, si le début intrigue à travers ses quelques pages se déroulant en France, le style de Gaël Faye a été un blocage presque total pendant plus de 200 pages. Ce n'est pas que c'est mal écrit, mais les mots se cognent, il n'y a aucune respiration, aucune fluidité, si bien que lire ne serait-ce que quelques lignes à la suite était parfois pénible. J'avançais lentement, peu aidé par l'incapacité de l'auteur à déployer son intrigue, passant près de la moitié du roman à raconter son quotidien familial et amical, intéressant au départ, lassant sur la durée.
Celui-ci sait en définitive beaucoup mieux imaginer, dessiner des personnages marquants que les faire évoluer dans une intrigue prenante, à laquelle on prendrait plaisir, si ce n'est à travers quelques inspirations
(la correspondance de Gaby avec Laure, chouette mais ne représentant qu'une poignée de pages).
Il y a, quand même, cette deuxième partie, où les massacres originellement en contre-champ finissent par apparaître avec une violence terrifiante, offrant des passages particulièrement marquants et un regard horriblement brutal sur la fin de l'adolescence, tout en nous éclaircissant sur les terribles événements de 1993, avec, en filigrane, la responsabilité du gouvernement français dans cette tragédie.
Dommage que niveau prose, le constat soit quasiment identique : de belles inspirations, mais une écriture toujours aussi étriquée, ne mettant pas assez en valeur ce qu'elle décrit avec un regard et une lucidité indéniables. Au moins a t-il le mérite de faire une conclusion convenable, n'hésitant pas à jouer sur la question de la mémoire et d'une volonté de tourner la page quasiment impossible... Bref, si c'est peut-être l'attente qui explique en partie cette déception et que je ne regrette pas de l'avoir lu, ne serait-ce que pour la qualité de ses protagonistes et sa description parfois vertigineuse d'un génocide, l'approche littéraire de Gaël Faye et son sens du récit, parfois étrange,notamment dans la première partie, reste assez rédhibitoire pour pouvoir apprécier comme je l'aurais souhaité une histoire et des événements ne pouvant laisser indifférents, que le cinéma saura, peut-être, exploiter avec plus d'efficacité (réponse dans quelques semaines!). Vraiment dommage.