Un positionnement clair vis-à-vis du féminisme n’a jamais été la préoccupation première de Stephen King. Mais avec des ouvrages tels que « Carrie » « Jessie » « Christine » etc… on s’aperçoit que la femme a souvent été l’incarnation du mal au même titre que les clowns ou les marchands de jouets. Au contact de son épouse, Tabitha, il s’est cependant ouvert aux subtilités de la psychologie féminine comme en témoigne « Histoires de Lisey ». Mais devait-il, sous l’impulsion de son fils aller jusqu’à vouloir écrire un roman dit féministe ? On a même lu, ici et là, sous la plume de critiques tout entiers dévoués à sa cause que ce roman était un plaidoyer à la cause féminine, voire une défense du droit des femmes. Quelle blague !
A la suite d’un inexplicable (et inexpliqué) phénomène, toutes les femmes qui s’endorment se retrouvent prisonnières d’un cocon qui les enveloppe entièrement et malheur à qui tentera de leur enlever. Mais cette calamité, au nom pourtant évocateur d’Aurora, leur permettra, comme de vulgaires chenilles, de se réveiller dans un monde meilleur, parce que sans hommes, nommé « Chez Nous ».
Allégorie assez simplette de la condition des femmes face au sexisme et à la discrimination exercés par les hommes et qui reste si peu compris d’eux. Mais le monde serait-il meilleur sans eux ?
A lire les King, on le croirait.
Dans cette nouvelle communauté, gentiment hippie et résolument écolo, libérées du poids des hommes, les femmes peuvent enfin se laisser aller à vivre car dans leur monde « une fillette pouvait rentrer seule chez elle, la nuit tombée, sans avoir peur ». Quant aux guerres ou aux conflits divers, il n’y a plus à s’inquiéter car pour le duo King « une femme n’a jamais déclenché une guerre ». C’est tout de même s’affranchir assez béatement de la réalité qui a vu des Margaret Tatcher ou des Golda Meir déclencher la leur. Et je n’ai pas la bonté de croire qu’une autorité matriarcale serait exempte de toute forme de violence. (Il est d’ailleurs assez piquant et paradoxal d’entendre les King le sous-entendre alors que la majorité de leurs personnages féminins viennent de la prison de Dooling, enfermées entre autres pour meurtres…)
Pendant ce temps-là, les hommes restés de l’autre côté de l’Arbre Fabuleux (qui est le passage entre l’ancien monde et le nouveau, mais qui ne fonctionne que dans le mode retour à l’ancien et uniquement empruntable par les femmes -ce n’est pas de la discrimination, ça ? ) glissent leur pantalon plié sous leur matelas pour le repasser et continuent à faire ce qu’ils ont toujours fait le mieux : boire et se tirer dessus (nous sommes aux USA) dans une guerre fratricide qui voit d’un côté un clan désireux de s’emparer de la seule prisonnière qui échappe à Aurora pour la remettre à la Médecine –pourquoi pas ?- et l’autre faction prête à mourir pour les en empêcher, on ne sait trop pourquoi. En n’oubliant pas une troisième faction d’abrutis boutant le feu aux cocons comme on brûlait les sorcières parce qu’il est établi que l’homme détruit ce qu’il ne comprend pas.
Evidemment, même quand on s’appelle King, il est impossible de rester sur une position aussi stupidement manichéiste et les deux compères auront tôt fait d’exécuter une marche arrière aussi prudente que ridicule puisque tout le monde se retrouvera du bon côté de l’arbre en tombant dans les bras les uns des autres et en promettant de ne plus se haïr.
Roman totalement ahurissant que celui-ci. On reste stupéfait devant la naïveté des propos des King et atterré devant les critiques, souvent féminines, qui prétendent que ce roman a fait avancer la cause des femmes.
Quant au style, il est catastrophique et la construction épouvantable. Les King nous balancent en entrée, genre prémices, une intro de 300p d’une inertie digne d’un pétrolier en pleine charge dans une rade avec, défaut récurrent chez King père, une exploration très profonde de la vie des personnages sans que cela n’apporte quoi que ce soit au récit. Ils enchaînent ensuite sur la préparation du siège de la prison avec force détails sur les protagonistes en présence et leurs armes respectives et enfin le siège de ladite prison avec effets spéciaux garantis et bande son tonitruante. J’ai même cru apercevoir Rambo avec un lance-roquettes. Le reste est un remplissage de banalités, de poncifs pleurnichards et de lieux communs sur la distinction simpliste des genres M/F.
PROBABLEMENT LE PLUS MAUVAIS ROMAN DE STEPHEN KING
Je sais qu’il ne me lira pas mais si quelqu’un pouvait lui passer ce conseil amical : Laisse ton fils se débrouiller seul avec sa carrière d’écrivain, reprends ta plume et contente toi d’écrire ce que tu fais le mieux, c’est comme cela qu’on t’aime. Et laisse les romans à thématique sociétale à ceux qui s’y entendent.