Le Spin, cette différence d'écoulement du temps entre l'atmosphère terrestre et le reste de la galaxie suite à l'apparition d'une espèce de dôme opaque au-dessus de la Terre, est une invention géniale, la turbine rotative qui fait voler ce roman de SF bien plus haut que la plupart des autres.
On est ici dans la science fiction la plus noble, celle qui, à partir d'un événement improbable, inexplicable et effrayant, fait ressortir les sous-entendus les plus inquiétants de nos sociétés. Dans Spin, l'inexplicable provoque rapidement l'explosion des religions en sectes concurrentes s'arrachant une prime à l'Apocalypse glorieuse et apaisée. D'un autre côté, le gouvernement étatsunien confisque rapidement toutes les informations importantes par paranoïa, par habitude du secret, par envie de tout contrôler. Les scientifiques se perdent dans une connaissance nouvelle et bouleversante tandis que les autres, toute la masse populaire se noie dans l'alcool, les petites lâchetés devenues grandes, l'appât du luxe à court terme.
Néanmoins, il ne faut pas réduire cette histoire à un tableau désespéré de l'humanité. Il y a Tyler Dupree, le principal héros de cette histoire, froid médecin ayant choisi de vivre le plus possible comme si le monde n'était pas en train de s'effondrer, amoureux d'une femme perdue dans sa volonté de croire en quelque chose qui pourrait expliquer l'incompréhensible. Des sentiments humains donc.
C'est pour moi d'ailleurs le petit défaut de ce roman ambitieux : le sentimentalisme et l'optimisme de l'américain moyen y est trop présent. Certes, il faut plutôt louer le parti pris de ne pas se vautrer complaisamment dans la violence et la description d'atrocités comme dans les séries à la mode d'aujourd'hui (Walking Dead, etc.) Cependant, hormis le décompte des morts et des suicides provoqués par tel ou tel changement dans le ciel, il manque une scène intimiste qui décrirait la véritable horreur de cette situation.