Le voila, le beau nouveau roman du génial Emmanuel Carrère, si joli et séduisant avec son titre unique, bi-syllabique et alléchant.
On le connait, Carrère. On a adoré ses romans modernes - celui qui parle du gars qui se coupe la moustache sans que personne ne s'en aperçoive, ou sa biographie géniale de Philip K. Dick. À travers ces deux oeuvres et toutes celles qui les accompagnent, on comprend qu'on fait face à un auteur français moderne qui se penche sur des thématiques originales tout en gardant une écriture simple. L'adversaire, génial ! Un peu étrange, cela dit, que l'auteur se mette autant en scène - mais on comprend que cela devient sa marque de fabrique et l'oeuvre est tellement puissante qu'on accepte cette lubie. Limonov - grand, grand roman !
Et le voila qui amène le Yoga et la méditation sur la table. Ouvrons.
Après un démarrage sympathique - Emmanuel part dans son stage de médiation et nous parle de cette pratique, de ce qu'il voit là bas - avant de s'interrompre en raison des attentats et de sa proximité avec une victime, nous sommes déçu car la narration semble s'arrêter et ne pas savoir par où repartir. Pire, nous nous sentons très rapidement floués. Certes, il va être question d'un stage de méditation intensive qui tourne court, donnant lieu à quelques reflexions et images pas dénuées d'intérêt, puis d'une crise depressive majeure, sans que le lien ne soit fait, d'un passage dans un camp de réfugié sur une île Grecque où les reflexions de l'auteur sur les malheurs du monde vis à vis des siens deviennent carrément gênantes de sottise. Et on finit par des pages et des pages sur son apprentissage de la dactylographie.
Mais personne n'a relu ce torchon ? Pas un éditeur, un ami lecteur du premier jet assez courageux ou professionnel pour lui demander de s'assoir, lui dire que 4 bouts d'histoires ça ne constitue pas un roman et que ça ne va pas être possible ?
Visiblement non, visiblement tout le monde a regardé autre part, et le livre fut publié. Dire qu'il s'est retrouvé sur la liste pour le prix Goncourt ! Espérons que cela en dit moins sur le potentiel de Carrère à écrire de grande chose que sur l'état déplorable de l'édition en France. Et même si ça ne disait que ça, n'y a-t-il pas un gros, gros problème ?