Pour des raisons qu’on ignore, un jeune homme dans sa vingtaine, Tatsuhiro Satō, vit en hikikomori depuis plusieurs années. Sa petite chambre d’(ancien) étudiant, prison d’isolement et de confort, est aussi son abri face à une mystérieuse association dont Satō est vaguement persuadé qu’elle domine le monde, et qu’elle est à l’origine de son enfermement : la NHK, « Nihon Hikikomori Kyōkai » (« compagnie japonaise des hikikomori », référence à la NHK, compagnie gérant les médias publics japonais). Un jour, il rencontre par « hasard » une mystérieuse jeune fille, Misaki, qui lui propose de participer à son « projet » censé le guérir de son hikikomorisme. Méfiant au début, il finit par accepter de suivre ses « leçons », qu’elle a écrites sur un carnet et lui lit a voit haute, le soir, dans un parc près de chez lui. En parallèle, Satō commence a côtoyer son voisin, qu’il ne connaissait que par l’agaçante musique d’anime qui traversait quotidiennement le mur de sa chambre. Ce voisin, Yamazaki, n’est autre qu’un kōhai auquel il avait tenté, quelques années auparavant, de porter assistance alors qu’il se faisait agresser par des camarades de classes. Il se lancent ensembles dans la création d’un jeu vidéo gyaruge, au départ pour offrir un alibi à Satō contre l’invitation de Misaki, puis, plus véritablement, parce qu’il s’agit d’une passion de Yamazaki (étudiant en école d’arts audiovisuels). La série narre le quotidien farfelu de ces protagonistes, qui tentent difficilement de trouver leur place d’adulte dans le Japon du début du XXIème siècle.
Cet anime a été un vrai coup de cœur. Déjà l’ambiance décalée est géniale, et doit beaucoup à la BO rock des Pearl Brothers, ainsi qu’aux openings et endings. On est immédiatement plongé dans la subjectivité de Satō qui oscille entre l’apathie et une frénésie angoissée. Cela n'est, d'ailleurs, pas toujours agréable, car cet antihéros est particulièrement bien écrit dans ses imperfections. Sa nullité en tant que créateur est flagrante, mais plus généralement il est inconstant, égocentrique et irritant de lenteur d’esprit. On se prend néanmoins d’affection pour lui, et ses actes de bonté ou simples mouvements d’empathie sont d’autant plus appréciables. Les autres personnages sont très sympathiques, mais surtout, ils existent pour eux-mêmes, non seulement à travers le prisme de Satō. Leur histoire et leurs combats personnels (quête de résilience pour Misaki, poursuite d’une carrière professionnelle choisie pour Yamazaki, lutte contre une angoisse existentielle pour Hitomi – ancienne senpai de Satō – etc.) ont même plus d’importance que ceux du personnage principal.
Regarder NHK ni yōkoso ! c’est, déjà, suivre avec délectation une tranche-de-vie bizarroïde qui offre ses moments de joie et de légèreté. L’histoire et la forme ont sans conteste une orientation comique. Mais pas seulement, loin s’en faut. La série se destine à un public de jeunes adultes et des thématiques particulièrement graves, violentes, dont certaines touchent particulièrement la société japonaise, sont abordées crûment : la dépression, l’addiction, le suicide… (j’en reste là pour ne rien divulguer). Avec un environnement sans pitié comme celui-ci, les phénomènes de réclusion volontaire s'expliquent aisément. Dans ce bourbier, Satō tombe dans presque dans tous les pièges qui se présentent (immersion dans un univers fantasmatique tordu, addiction aux jeux vidéos, Pyramide de Ponzi, effet barnum…). Il faut souligner sur ce point que, chez Satō la rhétorique du complot ne devient jamais un raisonnement très élaboré, et ce malgré tous ses ennuis. Il s’agit plus, pour lui, d’une impression angoissante, et, le cas échéant d’une explication très générale à la somme de ses problèmes.
Je ne m’étalerai pas plus, matez cette série elle en vaut le coup.