Lovecraft Country n'est pas une œuvre tirée d'un récit du maître de l'horreur cosmique mais adapte plutôt un roman de Matt Ruff qui en mêle quelques idées fantastiques à une Amérique des années 50, raciste. Cela a son importance puisque les protagonistes sont noirs et, derrière une mystérieuse histoire de famille, s'embarquent dans un road trip à travers le pays, marqué d'évènements surnaturels et d'apparitions de créatures monstrueuses. Les deux acteurs leads - Jonathan Majors et Jurnee Smollett - sont exceptionnels et fiables aussi bien dans l'action décomplexée que la dramaturgie face à l'horreur - plutôt celle humaine.
Le livre étant construit en huit histoires connectées, la série tente de retransmettre cette idée tout en gardant le focus sur les persos principaux. Et on peut ainsi regretter ce sentiment d'absence de réelle trame, au profit d'une thématique globale sur le passé des États-Unis, envers la ségrégation et la condition des femmes, ainsi qu'une bonne dose de mystère. Ainsi, chaque épisode amène des éléments inexplicables, parfois lovecraftiens - même si ce lien est peu prononcé - et le récit ainsi dispersé peut se montrer agaçant à suivre. C'est une sorte d'anthologie unifiée de l'horreur paranormale (et un peu SF) qui s'aventure dans le monde de l'occulte (magie, mythes anciens, folklore,...).
Avec ses 10 épisodes, la série est assez fantasque, s'inspirant de différents styles fantastiques sans que l'on ne sache jamais à quoi s'attendre. De porter un tel scénario à l'écran est ambitieux et on y voit régulièrement des choix audacieux au travers de scènes visuellement puissantes. Les effets pratiques gores sont véritablement dégueux (le body horror de l'ep 5), et certaines étrangetés morbides bien fascinantes. Quelques VFX sont toutefois bien plus kitsch (ep 2). Cela contribue à en faire une œuvre néo-gothique bien fournie et au commentaire social plutôt profond.