J'avais beaucoup entendu parlé de cette série (et ô miracle sans me faire spoiler) mais comme on ne peut pas être partout, je l'avais mise de côté. Grand bien me fasse puisque perdu dans un énième espace-temps du confinement à rechercher la perle rare - tu sais, cette série où ce film qui te scotchera devant ton écran et te laissera sur le cul...
Je me perds dans les tréfonds du rayon famélique de la vod offerte par mon opérateur (pour vous dire l'égarement dans lequel je me trouvais) et là au-milieu des dix (?!?) séries proposées, la tête d'Elliot Halderson (Rami Malek) que je ne connais pas encore... À moins que, je le connaîtrais déjà ce mec ?
A partir d'ici prends garde l'ami car tu seras spoilé...
Pourquoi ai-je l'impression de le connaître cet Elliot ?
Bien sûr ! C'est le méta-rejeton 2.0 de Tyler Durden, l'anti(vraiment ?)-héros (VRAIMENT ??? ) du Fight Club.
Dès les premières secondes, l'esthétique et le propos rappellent le film de Fincher, et c'est normal, les citations y sont nombreuses (la première étant le plan du premier hack, qui consiste (en simplifiant) à libérer le monde du poids des crédits et des dettes, ce que font les paumés du Fight Club en laissant tout péter à la fin du film). Cependant, Mr. Robot ne répète pas Fincher en le réactualisant, il lui rend un hommage dont le point d'orgue sera une magnifique reprise instrumentale du Where is my Mind des Pixies.
Mais pour Sam Esmail, créateur et principal réalisateur de la série, les sources d'inspirations sont, heureusement, plus nombreuses (on pourrait citer Kubrick, Brett Easton Ellis, Shakespeare et Dexter sans être exhaustif). C'est dans sa mise en scène talentueuse, technique, souvent glaciale qu'elles ressortent le plus. Mais également chez ses personnages et leurs (r)évolutions.
Incroyablement, j'ignorais l'implication de Christian Slater dans cette série. Ce fût donc une bonne surprise de voir son nom apparaître au générique et de le voir incarner le rôle-titre. Pas que je le trouve excellent acteur mais sa filmo, remplie de nullités par ailleurs, comporte tout un tas de film fun et sympa qui ont accompagnés ma jeunesse. Et je le trouve très à l'aise dans son rôle de Mr. Robot.
Pour passer brièvement le casting, on peut dire qu'il est d'excellente qualité. Outre C. Slater, mention spéciale à BD Wong, Carly Chaikin (vraie découverte) et à R. Malek évidemment.
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La première saison, magistrale, nous présente donc Elliot, génie de la défense et protection informatique le jour, hacker justicier la nuit, et le(s) mondes dans le(s)quel(s) il évolue. Ce pluriel possible vient des maux psychologiques profonds et des addictions de notre héros.
Parmi les quelques personnages gravitant dans sa galaxie, une voisine dealeuse et plan-cul, une meilleure amie d'enfance avec laquelle il travaille, une adepte du BDSM, une hackeuse rebelle et agaçante, les deux plus intéressants sont un drôle de gars appelé Mr. Robot qui veut mettre à genoux le plus gros conglomérat de l'histoire (une sorte de GAFA qui ne ferait qu' une seule entité en y ajoutant Sanofi, LVMH, et le groupe Accor) et Tyrell Wellick, jeune loup ambitieux travaillant pour ledit conglomérat, sorte de Patrick Bateman réactualisé aux nouvelles technologies.
Le propos, très anti-système, surfant même sur un complotisme mainstream par moments, est présenté avant tout par la voix-off d'Elliot. Acteur d'un monde invisible qui régit pourtant une bonne partie de nos vies numériques (dont la part grignote les autres de plus en plus), celui-ci, par des démonstrations brillantes, nous explique comment la population subit les décisions des 1% des 1% de ceux qui dirigent l'économie (et donc tout le reste), ceux qu'on ne verra jamais, dont on entendra jamais parler.
Plus la série avancera (en saison 2 particulièrement) et plus ce propos se diluera dans les enjeux scénaristiques, certes passionnants eux aussi, mais l'intérêt du tout s'en verra forcément un peu affaibli.
La saison 2, plus longue, subit de ce fait une baisse de rythme significative, surtout dans sa seconde moitié. La première moitié est construite pour amener à un twist dévoilé au milieu de la saison. Malheureusement celui-ci paraît un peu artificiel, comme si après le succès de sa première saison et de son twist final, Esmail s'était dit qu'il tenait là son concept. Mais attention, malgré ses quelques critiques négatives, la suite de Mr. Robot, reste bien au-dessus de la moyenne de la production "seriephilique" actuelle.
La troisième saison débute alors que la lutte entre Elliot et Mr Robot fait rage, l'un œuvrant dans l'ombre, la nuit et l'autre tentant de réparer les dégâts la journée. Pourtant, une paix est nécessaire tant le piège se referme sur les survivants de la fsociety.
Cette saison, ramenée à dix épisodes est plus nerveuse, à l'image de l'épisode 5, faux plan-séquence parfaitement truqué et surtout haletant de bout en bout.
Si la saison initiale reste la meilleure, l'épisode 6 de la troisième est sans doute le meilleur de la série.
La saison finale, comportant 13 episodes, nous emmène au dénouement de l'affrontement entre Elliott et WhiteRose et nous révèle les derniers secrets de notre ami.
Passionnante, foisonnante, surprenante, l'ultime saison clôt parfaitement une excellente série à l'écriture maîtrisée et possédant un ADN pour le moins original.
Succès critique et public à son apparition (relative surprise), Mr. Robot aura perdu de sa superbe au fil du temps (les 2 saisons centrales auraient peut-être gagnées en efficacité en fusionnant), pourtant ceux qui auront insisté savent qu'ils ont visionné l'une de ces pépites dignes du dernier âge d'or des séries.
Principalement grâce à sa mise en scène, son montage et sa musique. La partition du casting, d'une rare justesse générale, rehaussant encore ses qualités
Exigente, tant dans ses enjeux, que dans ses partis pris assumés, ou même avec ses spectateurs, cette série parvient, quitte à parfois frôler le ridicule ou le non-sens (sans jamais y tomber), à ne jamais rien céder à la facilité. L'épisode (presque) sans paroles (mais surtout pas silencieux) de la dernière saison en est un des exemples.
Le final lui-même (ou plutôt les 3 derniers épisodes) - et là, l'ami, ne dis pas que tu n'avais pas vu l'ale.rt plus haut - est aussi compliqué pour Elliott que pour celui qui le suit. Il faut tout abandonner, jusqu'à l'idée qu'il n'est pas le personnage principal d'un cauchemar dont il est pourtant l'instigateur. Pire, qu'il n'est même pas le héros de la série qu'on vient de suivre mais juste une sorte de guide, un pare-feu mis en place pour nous protéger de la réalité, comme Mr Robot l'était pour lui. Peu de séries, trop attachées aux cliffhangers attendus, oseraient remettre ainsi en question leur intérêt - voire leur existence - sans être certaines de ce qu'elles ont à raconté.
Esmail savait dès le début où il allait (d'abord pensé comme un long-métrage, le scénario a été déconstruit pour s'étaler en série) et connaissait la fin avant le début en quelque sorte.
Alors il jongle entre les styles narratifs et les genres. Polar, thriller techno, drame familial, tragédie... Tout y passe pour nous trimballer jusqu'à ce final préparé de longue date où nous serons pleinement et directement impliqués.
Caché derrière tout ça, je pense que Mr Robot est une série politique (au sens le plus noble du terme) plus que tout autre chose (bien loin des délires anarcho-schizo-maso des fight-clubbers).
C'est une des rares histoires qui arrivent à retranscrire les contradictions de notre société en bout de course en captant l'ambiance délétère occasionnée.
Tableau EXEL.lent !!!