D'emblée, je me suis demandé dans quelle mesure, avec cette série, Apple TV+ n'aurait pas cherché à copier la recette du succès de Defending Jacob, en 2020. Jake Gyllenhaal remplaçant en l'occurrence Chris Evans comme tête d'affiche.
(Cette propension à confier des rôles dramatique sérieux à des acteurs de films d’action gonflés aux stéroïdes.)
Les analogies sont frappantes : il s'agit d'une enquête sur un meurtre, mettant en cause un procureur (sa famille, pour Defending Jacob). Il s'agit surtout de nous faire douter jusqu'au bout : celui qu'il est question d'innocenter, ne serait-il pas l'authentique coupable ? Un tueur, et non un doux agneau ?
Nous voici devant une série de procès, comme il y a des films du même nom. Procès qui se matérialise dans la deuxième partie de la série, qui met en scène l’audience proprement dite. Les premiers épisodes nous montrent la préparation dudit procès, très médiatique, à l’américaine, avec une belle unité familiale autour de l’accusé, et une équipe de prosecution très retorse (sinon, qu’aurait à craindre le héros ?).
Je lis qu’il s’agit d’un remake, qu’il y a eu un film avec Harrison Ford, il y a pas mal d'années. Dont acte. Je ne le connais pas plus que le roman dont ces œuvres sont issues.
(Je m'aperçois que J. J. Abrams figure parmi les producteurs, ce qui est quelque peu surprenant.)
Je m'en tiens là pour l'heure, n'ayant pas fini de voir l'intégralité des huit épisodes. Mais un mot s'impose, pour moi, à ce stade : palpitant. Le récit est mené avec une grande maîtrise, les collègues et adversaires de Rusty-Jake sont extrêmement bien joués (mention spéciale pour Peter Sarsgaard), le suspense rebondit comme il se doit à la fin de chaque épisode : autant d'atouts pour une série.
Et j'en redemande.
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J'en suis venu à bout, en enquillant les épisodes finaux, ceux du procès donc.
"We are a family and we love each other."
Je ne vais évidemment pas spoiler ce qui conduit à ce constat final, empreint d'une certaine "morale" à l'américaine. Disons que le dernier quart d'heure du dernier épisode comporte un twist que je n'ai pas vu venir. Chacun en pensera ce qu'il voudra.
Et donc, en fin de compte, cette série ?
Jake Gyllenhaal n'est pas un très bon acteur, à mes yeux son jeu manque totalement de nuances. Mais cela n'a pas pour autant entamé mon intérêt pour le sort de son personnage. Intérêt fort soutenu, car on ignore jusqu'au bout ce que pourra être le verdict du jury : c'est nous-mêmes qui nous retrouvons dans la position de juger "beyond a reasonable doubt."
Pour le coup, cette partie, le procès, fonctionne très bien, c'est même une réussite. Au fil de quelques (plus ou moins) petits coups de théâtre, le duel qui s'installe entre Rusty, le mis en cause, et Tony Molto, pour l'accusation, occupe le terrain : qui va gagner ? Il n'est pratiquement pas question, en soi, de l'assassinat, de qui peut être coupable de la mort de Carolyn, l'amante de Rusty. Ce n'est pas l'enjeu central de la série.
On finira bien par savoir la vérité à ce sujet, mais je n'en dirai rien. Disons que c'est inattendu.
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Que retiendrai-je de cette série ? Son efficacité, incontestable. Son interprétation, inégale. Son atmosphère, pesante, à l'instar d'un procès qui doit plus décider de la vie d'un homme, qu'éclaircir le sort tragique d'une femme.
À l'arrivée je me sens un peu déçu. Peut-être en raison du côté sans aspérités, peut-être trop formaté de l'ensemble. Pas de grosse surprise, pas de faute de carre ; une morale finale hypocrite, parfaitement assumée.
Mais aucune ambiguïté, ce qui par comparaison avec le susnommé Defending Jacob, laisse finalement comme un goût de déception. Pas le genre de série que j'aurais envie de revoir.