En ce mois de décembre 2019, « The Expanse », c’est un petit peu la série du moment.
Parce qu’en effet, c’est ce mois-ci qu’est sortie la quatrième saison de cette grande saga spatiale ; une saga dont j’entends tout le monde me dire le plus grand bien.
Et pourtant – je vous le dis tout net – moi, cette saison 4 de « The Expanse », je ne la regarderai pas.
Alors j’entends déjà au loin la voix de Frédéric Molas – alias « Joueur du Grenier » – crier aux gémonies : « Mais non ! "The Expanse" c’est excellent ! C’est la meilleure série de SF de tous les temps ! C’est très crédible ! C’est vraiment de la SF qui se veut proche du réel contrairement à "Battlestar Galactica" qui partait dans un drôle de trip mystique ! Et même si c’est vrai que la première saison se la joue série policière un peu pataude, la saison 2 par contre elle casse tout ! Et à partir de là, ça n’arrête jamais ! Ça ne cesse de monter en puissance ! Ç’en est à tel point que, quand tu finis la saison 3, tu te dis qu’ils peuvent tenir comme ça pendant dix saisons tellement leur univers est riche ! »
J’ai beau adorer l’ami Fred Molas, de la même manière que j’adore tous les potes et collègues qui m’ont conseillé cette série, mais là – c’est manifeste – il me parait assez évident qu’on n’a définitivement pas la même approche de cette série.
Pire, je crois carrément qu’on n’a pas du tout la même approche des séries en général.
Le seul premier épisode annonce à lui tout seul la couleur.
Ouverture avec un carton, ce qui n’est jamais bon signe.
Pour moi, si on se sent l’obligation d’expliquer des choses par un texte écrit avant même de lancer son intrigue, c’est déjà qu’on ne se sent pas capable de l’expliquer normalement, par une narration conventionnelle.
Mais avant même que je puisse m’inquiéter de l’écriture, les premières images de la première scène tirent tout de suite un autre signal d’alerte.
Une femme, en apesanteur, prisonnière. Et autour d’elle le chaos.
A peine dix secondes que déjà la caméra se sent l’obligation de gigoter pour un rien. Cadre abusivement débullé. Cuts anarchiques. Photographie particulièrement hideuse ; retravaillée numériquement à l’extrême avec une saturation abusive et une teinte qui tire bien trop vers le bleu ou le gris. Habillage sonore omniprésent. Enchaînement des plans sans réelle logique de construction ni de cohérence. On en fait des caisses, dans tous les sens, tout en oubliant de faire l’essentiel. A sursignifier tout, au final on ne signifie rien.
Et tout ça se conclut par une image qu’on veut forte émotionnellement, interpellante. Mais le problème c’est qu’on nous montre tout. Aucun mystère. Aucune originalité non plus. Un mec qui se fait bouffer par une matière extra-terrestre bleu fluo, moi j’ai l’impression d’avoir déjà vu ça dans plein de films de Paul W.S. Anderson.
Non, vraiment, tout ça n’augure rien de bon.
Et malheureusement tout le reste du premier épisode n’est qu’une série de confirmations.
A ces scènes d’intérieur qui ne prennent le temps de rien poser s’ajoutent d’autres scènes, dans l’espace, où là aussi on fait joujou avec les imageries numériques sans trop réfléchir.
Sous prétexte que la caméra peut tourner dans tous les sens alors on le fait.
Pas de recherche pour réfléchir à des rapports d’échelles ou des effets de masse.
Pas de réflexion pour identifier et poser les lieux.
Et surtout aucun effort pour essayer de cacher astucieusement la misère technique de ces effets spéciaux plus que limités.
Non. A aucun moment on ne semble réfléchir à l’effet produit en termes de projection du spectateur dans ce nouvel univers.
Au contraire, on a l’air persuadé que pour faire bien il faut faire vite. Il faut faire beaucoup. Il faut surcharger.
S’agiter pour distraire les gens plutôt que de leur poser les choses.
Une bien triste démarche qui moi me désole…
Alors oui, j’ai conscience qu’en insistant à ce point là-dessus je peux donner l’impression de m’attarder sur des détails et de chipoter pour un rien.
Mais je suis désolé, malheureusement, cette forme n’est pas rien.
Au contraire, cette forme, elle dit déjà tout ce qu’il y a à savoir de ce « The Expanse ».
Elle dit tout de l’état d’esprit des créateurs de cette série.
Mais surtout – et c’est triste à dire – elle dit tout de leur degré d’immaturité.
Regarder le reste de ce premier épisode défiler sous nos yeux, c’est accepter de regarder (consterné ou non) un terrible enfilement de clichés tous plus éculés les uns que les autres. Des lieux qu’on connait déjà tous pour peu qu’on soit déjà passé par « Babylon 5 », « Cowboy Bebop » ou « Battlestar Galactica. » Des personnages qu’on a cernés aussi en moins de dix secondes tant ils sont stéréotypés et superficiels. Et pourtant, malgré ça, l’épisode s’étire en longueur pour nous présenter tout ça.
Etait-il vraiment nécessaire de passer presque dix minutes pour faire de la simple exposition autour de Miller, caricature ultime du flic alcoolique et borderline ?
Et en fallait-il tout autant pour présenter l’équipage du Cant ? OK, Holden sera le bellâtre au grand cœur. Nagata sera la sidekick qui se transformera rapidement en love interest (et qui ne se réduira d’ailleurs qu’à ça durant trois saisons.). Amos sera le brutos aux gros bras et Alex le sympa un peu naïf. Tout un épisode pour ça ? Vraiment ?
Ah ça le temps ! On le gaspille dans « The Expanse » !
Du temps passé à parler et parler encore, tout ça pour brasser du vent.
Pour occuper l’espace sonore.
Pour espérer donner l’illusion d’une profondeur chez ces personnages aussi lisses et épais qu’une feuille de papier.
Et à la fin de ces longues quarante-cinq minutes que compte le premier épisode, le bilan en termes de péripétie et d’avancement de l’intrigue se révèle tragique.
Car au bout du compte il ne s’est rien passé.
Une nana est prisonnière dans un vaisseau. On invite Miller à enquêter dessus. Et pendant ce temps les gars du Cant tombent sur ledit vaisseau par hasard.
La conclusion pose juste un moment qu’elle espère émotionnellement fort mais, faute à un terrible manque de subtilité et d’originalité, elle échoue lamentablement.
(Non mais les gars… Franchement… Vous croyiez vraiment que personne ne vous verrait venir avec la mort de la blondinette de Holden ? A passer votre temps à montrer à quel point Holden est amoureux d’elle ; à marteler l’idée qu’il pense à tout plaquer pour vivre le grand amour loin de la folie des hommes ; on se doute que vous allez la faire crever ! Mais bon, si vous voulez vraiment qu’on se prenne d’empathie pour Holden et sa belle, d’une part faites en sorte que le personnage sacrifié existe autrement que comme un simple réceptacle vide dont on se fout de la disparition et puis surtout, d’autre part, essayez de faire en sorte que dans la suite, Holden n’oublie pas sa belle en seulement quelques épisodes ! Enfin bon, moi je dis ça, je dis rien…)
Et malheureusement, sur tous ces aspects là, du premier épisode de la saison 1 au dernier épisode de la saison 3, à part une sensible amélioration dans les effets spéciaux, rien de bougera.
Toujours cette culture de l’agitation.
Toujours cette logique d’accumulation plutôt que d’approfondissement.
Toujours ces bavardages imposés qui ne sont là que pour faire ralentir le plus possible l’intrigue.
Et c’est con mais, pour moi, c’est ça qui tue tout ce qui aurait pu faire de ce « The Expanse » une chouette série.
Parce que oui – et c’est ça qui est tragique – il y a au milieu de cette tragédie quelques bonnes idées qui auraient mérité bien mieux.
C’est que, l’air de rien, je m’en suis quand-même enfilé trois saisons de ce « The Expanse ».
Une assiduité de ma part qui dit forcément quelque-chose de ce que cette série peut contenir.
Une promesse. Mieux : un espoir.
Alors après c’est vrai – soyons honnêtes jusqu’au bout – si on ne m’avait pas tanné pour que je regarde la saison 2 – et si l’ami Molas n’avait tant insisté sur le fait que la série décollait vraiment au-delà de la saison 1 – je pense que je tiendrais sûrement aujourd’hui un autre discours. Parce que oui, franchement, moi je ne vois pas grand-chose à sauver de la saison 1.
Par contre, c’est vrai qu’à partir de l’épisode 4 de la saison 2, quelque-chose se passe. Les auteurs commencent à abattre leur jeu et à ouvrir une porte là où je ne m’y attendais pas.
(Que la protomolécule aille s’écraser sur Venus pour – pense-t-on – faire germer une civilisation extraterrestre juste à proximité de la Terre, j’avoue que j’ai trouvé que ça offrait de sacrées perspectives pour la suite…)
Plus généralement, à partir de cet épisode 4 de la saison 2, la scénario commence à lâcher la bride. On découvre enfin des lieux nouveaux…
(Ganymède notamment)
…de même qu’on se risque à poser des atmosphères nouvelles…
(Je n’ai par exemple pas craché sur le trip « akiresque » des expériences menées sur la fille de Prax, même s’il reste très soft dans sa mise en scène).
C’est aussi à partir de là que la série commence à vraiment prendre la peine d’explorer les endroits pourtant présents dès les premiers épisodes…
(La balade de Draper sur la Terre est notamment une bonne surprise de cette saison 2 car elle permet enfin de voir cette planète comme un lieu de vie, mais aussi comme un lieu de projection de fantasmes pour une Martienne comme Draper).
Et puis surtout, on y voit enfin s’y exprimer une volonté de faire évoluer les personnages, soit par des péripéties…
(Avec la mort de Miller par exemple : quel soulagement…)
…ou bien par des retournements de position salutaires.
(Par exemple le changement de camp de Draper qui donne enfin de l’intérêt à un personnage qui, jusqu’alors, était terriblement pauvre et caricatural. Bon, c’est vrai que ça ne va pas la transformer en personnage subtil et bien écrit pour autant, mais c’est toujours ça de pris. Quand on n’est habitués à rien, on se contente de peu.)
Et c’est vrai que ce type d’efforts là, on en retrouvera tout le long des épisodes qui suivront, saison 3 incluse. Sur ce point, difficile de reprocher quoi que ce soit à ce « The Expanse ». Il y a une volonté véritable de la part des auteurs à disséminer des péripéties, à mouvoir leur monde et à ouvrir de temps en temps leur univers vers des perspectives osées et vertigineuses.
L’ouverture de « l’anneau » en plein milieu de saison 3, j’avoue, c’était couillu. Et puis ça retourne l’intrigue vers une direction totalement inattendue. Le fait de conclure cet arc narratif par l’ouverture d’une multitude de portails vers d’autres univers, ça donne soudainement toute la dimension de ce projet et surtout toute sa signification au titre de cette série : « The Expanse ».
En cela, je comprends l’engouement des fans.
En cela, je comprends l’engouement de Frédéric Molas…
Seulement, malgré ces quelques prises d’initiatives, pour ma part ça ne règle pas le fond du problème.
« The Expanse » a beau tenter des choses – elle a beau être une série généreuse – elle ne parvient cependant pas à élever son triste niveau formel. Mais surtout, sa pire tare, c’est qu’elle reste engluée dans les pires bas-fonds de l’écriture, et cela tout le long des trois saisons.
Trois saisons n’auront donc pas suffi pour que les auteurs apprennent enfin à donner de l’épaisseur aux personnages. Car au fond l’enchainement des épisodes démontre clairement que les auteurs n’ont aucune vision évolutive des choses. Holden restera ad vitam le bellâtre au cœur noble qui, sous l’effet de la passion, prend les mauvaises décisions mais finit toujours par entendre raison (et cela épisode après épisode), Nagata restera le love interest au cœur tendre qui a peur de s’engager, retournant régulièrement dans le camp des rebelles avant de se rendre compte que sa vraie famille est finalement restée sur le Roci (… et – pareil – elle nous fera le coup quelques fois l’air de rien.) Sadavir restera, quoi qu’il décide et quoi qu’il fasse, le grand méchant de l’histoire… Etc etc… Autant dire qu’avec une limite pareille, on a l’impression de suivre des héros unidimensionnels qui n’apprennent rien de leurs expériences et qui sont ainsi condamnés à refaire et redire sans cesse les mêmes choses. L’effet est assez terrible, surtout quand il est servi par des acteurs aussi fades et – j’ose le dire – souvent assez mauvais.
De même, trois saisons n’auront donc pas suffi non plus pour que les auteurs apprennent à poser un rythme, hiérarchiser les effets et développer un arc. Quelque soit la situation, le mouvement et la densité sont privilégiées. Si bien qu’entre un moment où deux personnages échangent platement du background superficiel et un moment où ils énoncent un élément-clef de l’intrigue, il n’y aucune différence.
C’est lancé comme ça, à la débottée, au milieu d’une conversation qu’on saisit souvent au vif. Pas de remise en contexte. Pas de moment de respiration pour qu’on puisse se préfigurer les choses. Si bien que regarder un épisode devient étonnamment éprouvant. On doit être vigilant en permanence, parce qu’au milieu de la bullshiterie insignifiante et des interminables répétitions, il va y avoir à un moment un détail qu’il va falloir saisir au vol et qui aura son importance.
Les moments où j’ai dû revenir en arrière pour mieux saisir les choses ont été légion. Et devoir consacrer tant d’efforts pour une série aussi incohérente dans son scénario et aussi pauvre narrativement parlant, c’est quand même vraiment pénible.
J’aurais tellement de choses à redire sur cette écriture que je pourrais m’étendre dessus pendant des pages et des pages, au risque d’ailleurs de rendre cette critique absolument imbuvable. Et comme mon ambition n’est surtout pas l’acharnement, je ne vais pas faire une liste exhaustive des autres reproches d’écriture que je pourrais faire avec cette série.
Non, à la place, je vais simplement me contenter d’un petit top 10 !
– 10 –
Le non-suspense dans le vaisseau de Jules-Pierre Mao en fin de saison 2.
On nous pose cette scène comme le gros climax final de la saison 2. La très gentille Avasarala est venue négocier la reddition du très méchant Jules-Pierre Mao, loin de toute protection, sur le vaisseau du méchant, et en n’ayant prévenu personne à part l’autre grand-méchant de l’histoire : Sadavir Errinwight. Mais que va-t-il donc bien se passer ???
Ô surprise ! Avasarala tombe dans un piège. Mais il se trouve que – comme par hasard ! – elle a pris à ses côtés la très gentille Draper (pourtant dans le camp ennemi quelques jours plus tôt) et que – comme par hasard – on a emmené sa tenue de combat au cas où. Je me demande bien s’ils vont s’en sortir !!!
Ô surprise ! Draper parvient à consulter les plans du vaisseau en questionnant la moquette (visiblement, les codes d’accès, dans le futur, c’est devenu secondaire). Puis elle découvre comme par hasard que dans ce vaisseau ultra-futuriste, il se trouve une grosse trappe de conduite d’aération digne du tout premier « Die Hard » et que – bien évidemment – cette trappe est de taille humaine et elle se déclipse à la main. Je vous laisse imaginer ce qui se passe ensuite. Est-ce que Draper et Avasarala vont s’en sortir ? Il faudra un épisode et demi pour avoir la confirmation de ce qu’on sait tous déjà…
– 9 –
Prax, l’homme qui oublie ce qu’il a pensé cinq minutes plus tôt.
On est dans le dernier épisode de la saison 2. Un Kaliban est présent dans le Rocinante. Il faut le détruire. Prax ne veut pas. Ce Kaliban est peut-être sa fille ! Donc il s’oppose… Mais dix minutes plus tard il participe avec zèle au plan d’extermination du Kaliban… Avant de se rappeler en fin d’épisode, au moment où il doit lancer la bombe sur sa cible que – ah mais oui au fait ! – c’est peut-être sa fille !
Mais bon, à la décharge de Prax, il n’est pas le seul à être touché par cette terrible maladie puisque dans le même épisode, Nagata qui avait quitté Holden parce qu’il voulait tuer le Kaliban finit par totalement retourner sa veste dès qu’elle découvre qu’il y a un Kaliban dans le Roci. Bref, c’est beau la cohérence…
– 8 –
La diplomatie pour les nuls, ou leçon de diplomatie martienne volume 1.
Une conférence de paix a lieu sur Terre entre les représentants de l’ONU et Mars. Draper est conviée pour livrer son rapport sur l’incident de Ganymède. C’est un soldat. On l’a briefée. Elle ne doit rien dire du Kaliban qu’elle a rencontré lors du combat. Mais bon, la gentille Avasarala veut tout de même entendre Draper. Visiblement, le témoignage d’un soldat ennemi sous ordres vaut tout de même la peine d’être entendu. Et visiblement à raison puisque – ô surprise – Draper s’emporte et finit par révéler malgré elle l’existence du Kaliban !
Oups ! C’est vraiment trop ballot !
– 7 –
Les plans de méchants pour les nuls, ou leçon de diplomatie martienne volume 2.
Draper vient tout juste de vendre la mèche lors de la conférence de paix. Elle se rebelle. Elle est mise aux arrêts. Du coup, son supérieur Maertens, pour la punir vraiment, se décide de la convoquer dans son bureau, sans garde, la porte ouverte, afin de lui dévoiler les plans secrets de l’armée martienne à voix haute tout en gardant bien en main la tablette sur laquelle se trouve toutes les preuves…
Dois-je expliquer ce qu’il va se passer ?
– 6 –
Savoir être un vrai méchant : la leçon de Roma, le big truand de Ganymède.
Coincés sur Ganymède, nos héros sont dans la mouise. Il faut retrouver la fille de Prax mais pour cela il faudrait avoir accès aux caméras de surveillance de la station. Problème : pour y avoir accès il faut passer par celui qui nous est présenté comme le big vilain de Ganymède. Roma.
La rencontre va être un grand point de tension dans l’histoire, et elle pourrait se résumer de la façon suivante :
« Bonjour je suis Roma, je détiens tous les secrets et toutes les réserves de bouffe de Ganymède mais je suis seul chez moi, sans garde, et j’accueille sans méfiance plein de gens armés chez moi ! Que voulez-vous ?
– On veut avoir accès aux vidéos de Ganymède.
– Pas question !
Pif paf pouf !
– On veut avoir accès aux vidéos de Ganymède.
– Bon d’accord… »
– 5 –
Les supers plans de la capitaine du Somnambule…
La situation est décidément très difficile sur Ganymède. Il n’y a bientôt plus d’air. Les gens qui vont rester sur place vont mourir.
Heureusement, le Somnambule, vaisseau de transport, est là.
Malheureusement il n’a pas suffisamment de place.
Malheureusement les gens sont paniqués et prennent le vaisseau d’assaut.
C’est terrible.
Il faut agir vite.
Il faut trouver une solution.
« Eh toi ! Le mec baraqué !
– Oui ?
– Tu peux retenir à toi tout seul plusieurs centaines de personnes ?
– Oui !
– Alors fais-le et tu auras ta place pour partir !
– Ça marche !
Intervient alors Nagata.
– Mais c’est totalement con, capitaine. Il n’a qu’un bâton. Ça ne va pas marcher !… Ah bah si ça marche.
– Ha ha ! Tu vois Nagata ! Le scénario est avec nous ! Allez c’est le moment d’en profiter ! Eh le mec baraqué ! Fais un speech larmoyant pour que les gens acceptent par eux-mêmes de qui va partir et qui va rester !
– Ça marche !
– Mais capitaine ! Ça ne va pas marcher !… Ah bah si ça marche. »
– 4 –
Le Roci, big-boss du missile.
Saison 2. La situation est tendue autour de Ganymède. Deux armées planétaires se font face. Il suffit d’un rien pour que tout le monde s’envoie des grosses ogives dans la tronche. Mais voilà que le Somnambule, vaisseau humanitaire dans lequel se trouve Nagata, se risque à enfreindre le blocus. Il va se faire torpiller, c’est sûr, mais – tada ! – débarque tout aussitôt le Roci, avec son capitaine intrépide James Holden ! Avec son petit vaisseau tout pourri et son air super menaçant il dézingue le missile lancé par les forces terriennes et menace tout aussitôt les deux armées !
« J’ai verrouillé tous vos vilains vaisseaux ! Si vous tirez sur le Somnambule, je tire sur tout le monde ! Ha ! Ha ! »
A ce moment là, le pilote du Roci émet un doute.
« Mais capitaine ! On prend un gros risque là, non ?
– Mais bien sûr que non ! Mars et la Terre sont trop préoccupées à vouloir se faire la guerre ! Personne ne va vouloir perdre des forces avec nous alors qu’ils veulent avant tout se taper entre eux !
– Mais… Mais capitaine ! Vous avez raison ! Ils ne tirent pas sur le Somnambule ! Ni sur nous ! Vous êtes un génie !
– Je sais, petit… »
Holden, un génie ?
Franchement si la scène avait été un minimum réaliste, il se serait plutôt passé ceci :
« Mais capitaine ! On prend un gros risque là, non ?
– Mais bien sûr que non ! Mars et la Terre sont trop préoccupées à se faire la guerre ! Personne ne va vouloir perdre des forces avec nous alors qu’ils veulent avant tout se taper entre eux !
– Mais quelles forces ils perdraient ?! On est à un contre cent là !
– Oui mais mon super petit vaisseau il peut envoyer plein de missiles sur tout le monde !
– Des missiles qu’ils pourront poutrer à coup de mitrailleuses hein… Parce que bon, c’est ce qu’on vient de faire à l’instant avec les leurs.
– Ah… Oui… Mais nous on a plus de missiles !
– Bah non. Le Roci on l’a récupéré sur un gros croiseur martien. C’est un vaisseau d’appoint. Ça serait quand même con qu’un petit vaisseau ait plus de missiles que toute une flotte non ?
– Euh… Oui… C’est sûr que vu comme ça.
– En fait si nous on envoie un missile sur chaque vaisseau, techniquement chacun de ces missiles se fera dégommer sans souci. Alors que si chacun de leur vaisseau nous envoie un missile à la gueule…
– A ouais ça fait un peu une grosse flopée de missiles quand même…
– Alors de deux choses l’une : soit les missiles servent à rien dans cette guerre parce qu’on peut les déquiller super facilement, soit on est dans la merde.
– Oui oui… Effectivement… En fait il pue un peu du cul mon plan.
– Missiles en approche, capitaine…
– Bon bah… Messieurs, ce fut un honneur d’avoir servi à vos c…
BOUM.
Fin de « The Expanse ».
– 3 –
Nguyen, le big-boss du missile
« Comment ? Un de mes vaisseaux refuse de m’obéir ! Détruisez-le ! »
Un missile est envoyé par Nguyen. Le vaisseau réfractaire est détruit.
« Comment ? Parce que j'ai détruit un vaisseau de ma propre flotte, celle-ci se retourne contre moi et me tire des missiles en retour ? Détruisez-les ! »
Le vaisseau du général Nguyen tire à la mitrailleuse et détruit tous les missiles qu'on lui a adressés.
« Alors ?! C’est que le patron ?! Et maintenant, on envoie les Kalibans !
– Mais général. De où qu’on peut commander la base secrète de Jules-Pierre Mao ?
– Eh bah on peut maintenant ! C’est parti !
– Mais est-ce que ça veut dire que vous êtes dans le camp des méchants, général ?
– Pas du tout ! Et le fait qu’on vienne d’essuyer une mutinerie dans ce vaisseau n’est absolument pas un signe qui doit semer le doute chez vous !
– Bah… Bah si ! Quand-même ! Et puis il est un peu tout con votre plan mon général ! Non seulement vous êtes tricard auprès de tout le monde en balançant les Kalibans, mais en plus rien ne va empêcher vos missiles d’être interceptés par les mitrailleuses adverses !
– Ah oui ? Et pourquoi ça ?
– Bah parce que si nous on peut intercepter des missiles, eux aussi ils peuvent ! Non ?
BOUM.
– Ah bah non… »
– 2 –
L’introduction concernant les moteurs Epstein.
On est en plein cœur de la saison 2. La situation commence à bien bouger.
Étonnamment, un des épisodes se décide de commencer par un retour en arrière de plusieurs années.
Que nous présente-t-on ? Un gars qui est dans l’espace avec un vieux vaisseau. Il teste un truc. Un moteur.
Surprise, le moteur va super-vite.
Le pilote, Epstein, manque d’y laisser sa peau. Et puis…
Et puis plus rien.
Ce passage a été assez long. Assez pauvre en lui-même. Mais bon, on nous l’a posé là. C’est que ça doit être important.
Bah non.
En tout et pour tout ce moment n’a servi qu’à faire écho à une phrase de l’épisode. « Hmm… Il faut qu’on y aille très vite… Allumez donc les moteurs Epstein. »
Voilà. C’est tout.
Nombre de scènes qui reviendront sur ce qu’est devenu ce pauvre Epstein :aucune.
Nombre de fois où on reparlera de ces moteurs dans les deux saisons suivantes : zéro.
Je vous laisse méditer.
Pour moi ça se passe de commentaire.
– Quelques mentions honorables –
Volovodov, l’experte en discours qui ne sait ni parler, ni penser.
L’histoire des gars déformés par l’apesanteur qu’on oublie au bout de trois épisodes.
L’histoire des petites pastilles utilisées par les interrogateurs martiens dont finalement on ne fait rien.
La gravité qu’on évoque quand ça arrange. Pour Draper c’est un souci sur Terre, mais ça n’en est plus un sur des petits cailloux comme Cérès ou Eros.
Miller qui veut absolument retrouver Julie Mao parce qu’il est mystérieusement tombé amoureux d’elle.
Holden qui dit à Miller qu’il faut se dépêcher parce que Eros est pleine de radiations… Mais qui s’arrête dans l’instant pour raconter l’histoire de son enfance…
Miller et Holden qui transpirent à grosses gouttes, qui vomissent et qui peinent à se déplacer parce qu’ils viennent de subir un paquet de radiation sur Eros. Puis dans la minute qui suit tout va bien. On soulève des objets lourds, on gambade… Et puis à nouveau ça ne va plus bien… la magie des radiations.
La magie des bracelets qui soignent tout.
Draper, la fille qui a besoin de s’agripper à un vaisseau qui va beaucoup trop vite… Alors qu’elle est dans l’espace. (Mais peut-être que dans le futur, il y aura de l’air dans l’espace. Je ne sais pas.)
Draper, toujours elle, qu’on nous présente comme une militaire disciplinée mais qui perd toute contenance dès qu’on lui met des sushis sous le nez.
Avasarala qui… Avasarala, point.
– 1 –
And ze winner iz…
Les mormons du futur !
Non mais là… Non.
Quand je repense à Fred Molas qui disait qu’il n’était pas trop fan de « Battlestar Galactica » parce que ça vire vers quelque-chose de mystique. Mais QU’EST-CE QUE TU DIS DE ÇA ?!
Dans cette série, la seule religion qui existe à l’écran, c’est la religion mormone !
C’est les mormons qui ont la réponse à toutes les questions existentielles.
C’est eux qui construisent le plus gros et le plus beau vaisseau de l’histoire de l’humanité !
Non mais… WOOOOOOOH !
C’est quoi ce prosélytisme foireux !
Rien que ça, ça mériterait un zéro pointé !
Qu’on retrouve ça dans cette série avec aussi peu de subtilité, je trouve ça juste FOU.
Enfin bref…
Voilà donc ce qu’est aujourd’hui la série « SF » de référence.
Moi, je vous l’avoue, le succès que rencontre ce « The Expanse », j’en reste un peu coi.
Et tant de gens estimables qui m’en vantent pourtant les mérites !
Je vous l’avoue, ça m’interroge…
Ou plutôt non.
Ça ne m’interroge plus.
Car au fond je crois avoir compris la raison d’un tel engouement. Et ce n’est clairement pas lié aux qualités ou défaut intrinsèques de la série.
Non, ça n’a presque rien à voir.
C’est lié à tout autre chose.
A dire vrai, il ne m’a suffi de lire seulement quelques critiques pour comprendre.
Deux mots reviennent quasiment tout le temps chez les adorateurs de cette série.
Ces mots, c’est « Battlestar » et « Galactica ».
Ah ça ! On la cite souvent la série de Ronald D. Moore. Et on sent que beaucoup d’adorateurs d’épopées spatiales se sentent orphelins depuis la fin de cette saga en 2009…
Ces adorateurs étaient tristes. Ils voulaient retourner dans l’espace. A n’importe quel prix…
Ce « The Expanse » leur en a donné l’occasion.
Ça les a rendus contents.
Ils ont fait le tri dans leur esprit. Ils ont pris ce qui les faisait rêver et ils ont occulté, consciemment ou non, tout le reste.
Alors soit. S’ils sont contents. Tant mieux.
Mais ne nous leurrons pas pour autant sur ce qu’est ce « The Expanse ».
Certes, ça aurait pu être une sorte de « Babylon 5 » revu et corrigé, qui pense l’expansion de l’humanité de manière linéaire. Et franchement ça aurait pu être vachement intéressant en termes d’exploration et de réflexion.
Mais bon, quand l’esprit est petit, l’univers l’est aussi.
Quand au final on ne sait pas réfléchir au-delà de quelques bigoteries de bas-étages ; quand ta vision de l’humanité reste désespérément américano-centrée et où tout le reste du monde se retrouve résumé qu’à de simples seconds rôles se devant de représenter quelques minorités ; et quand ta réflexion sociétale est quasiment inexistante au point de se résumer en tout et pour tout qu’à quelques clins d’œil en direction des quelques causes moralisatrices du moment, c’est clairement ne pas être à la hauteur de ses propres ambitions.
Mais bon…
« The Expanse » est là, et vraisemblablement elle plait.
Alors soit. Que ceux qui peuvent s’en satisfaire s’en satisfassent…
Mais pour quiconque nourrit quelques exigences en termes de série ou de cinéma, je pense qu’il vaudra mieux attendre le prochain vaisseau…
En espérant bien sûr que celui-ci vienne un jour…