Les productions Netflix s’enchainent avec une qualité très inégale. D’un côté on peut tomber sur « the haunting of hill house », une série très inspirée, qui prend le temps de manipuler des thèmes universels avec délicatesse.
De l’autre, « Polar » recycle péniblement les codes du film coup de poing en essayant même de poser une direction artistique loufoque, qui bien souvent tombe à plat.
Fraichement sortie, « The order » est en apparence un énième teenage drama qui souhaite surfer sur la vague du fantastique. D’ailleurs la bande-annonce kitch comme pas possible, sécrète un jus au goût de harry potter mixé avec le loup-garou du campus qui ne sent pas bon du tout.
Et pourtant…
S’il y a bien une chose que personnellement je trouve séduisant c’est la capacité à se laisser sous-estimer pour ensuite surprendre son monde. Cette espèce d’assurance intrinsèque que l’on a le droit d’exister, sans avoir pour autant à jouer du théâtre comme les autres.
Et c’est précisément pour cette raison que j’ai autant appréciée cette série, facile à prendre de haut, mais qui, mine de rien raconte quand même quelque chose et elle le fait plutôt bien.
Son premier exploit, présenter pour une fois des loups-garous qui ne ressemblent pas à des chiens, le plus souvent subordonnées à la suprématie des vampires.
Cela peut paraître infime comme qualité, mais quand on apprécie cette créature et la symbolique qu’elle porte, c’est vraiment rafraichissant !
Leur design est sympa, impressionnant, la mythologie qui les accompagne (un peu en mode power rangers) est facile d’accès tout en laissant la porte ouverte à un développement plus complexe. Et puis merde, il faut bien le dire, ils sont puissants !!!
C’est d’autant plus vrai que l’opposition est incarnée par des sorciers, fragiles, soumis au sacrifice lorsqu’il s’agit d’utiliser la magie.
Cette idée que tout à un prix est aussi quelque chose d’agréable. Perturber le cours des évènements entraine des conséquences et si ce n’est pas pour celui qui lance le sort, c’est un autre qui en pâtira.
On est loin d’une débauche magique sans queue ni tête !
Toutefois si ces deux éléments sont agréables, ce qui constitue le sel de « the order » c’est sa tonalité.
Elle sonne comme un teen movie, façon American Pie, avec un humour souvent bien senti, mais le plus intéressant c’est le portrait volontaire ou pas (difficile à dire) de notre société individualiste.
Les morts se succèdent sur le campus et a priori tout le monde s’en fout. Chacun est centré sur les intérêts de sa petite personne, d’ailleurs mention spéciale au personnage caricaturale de la « pétasse » qui incarne vraiment bien cet état d’esprit.
Finalement c’est la grande force de cette série, afficher le narcissisme avec une telle désinvolture que ça vient choquer le spectateur. Et dans le même temps, la légèreté, l’écriture des vannes vient détendre l’atmosphère et relativiser le contexte.
Cet état d’esprit donne à la série une identité « je m’en foutiste » qui fait du bien, surtout dans un contexte créatif ou l’on peut parfois avoir l’impression d’osciller entre des productions mercantiles ciselées qui cartonnent en s’appuyant sur la puissance des licences et des « œuvres » se voulant plus intimes, tellement que l’aspect pathos/tolérance en devient beaucoup trop baveux pour être supportable.
The Order pourrait bien être née d’un pitch élaboré entre potes, le soir dans un bar : « C’est une série sur un campus avec des loups-garous et des sorciers qui se font la guerre et puis en fait bah c’est marrant parce que tu vois le héros c’est trop un branleur et avec ses potes ils picolent et puis le méchant sorcier, il veut carrément contrôler la magie elle-même, mais le héros avec sa meuf bah ils vont l’en empêcher »
C’est simple et manichéen, mais c’est étalé avec tellement d’authenticité, sans se prendre pour je ne sais quoi, que finalement cela fini par marcher.