A une époque où les supports numériques balbutiaient, où Netflix et consorts n'existaient pas, le moyen le plus simple pour suivre une série était encore la television. C'était un temps où l'on devait se trouver devant son poste le jour J à l'heure H de la diffusion ou programmer son magnétoscope le cas échéant. Sous peine de manquer certains épisodes qui pouvaient pourtant s'avérer essentiels pour la bonne compréhension de l'intrigue.
Heureusement, The Shield, une histoire de flics ripoux, fut d'abord programmé par Canal +. Ainsi, grâce à la multidiffusion, je ne ratai rien d'une des premières séries qui me passionna (je ne vis les Soprano que bien plus tard, tout comme Six Feet Under).
Nous voilà plongés dans The Barn (le Bercail en vf), nouveau commissariat installé dans un quartier fictif de Los Angeles plus vrai que nature, Farmington.
La Strike Team (équipe de choc) nouveau groupe anti-gangs y prend ses quartiers, aux côtés des flics en uniformes, des inspecteurs criminels, le tout sous la houlette d'un nouveau capitaine aux dents longues, plus politicien que policier, Aceveda.
La Strike Team se compose de Rony, Lemanski, Shane et Vic McKay, leur imposant et charismatique leader (Michael Chiklis, incroyable d'intensité). Ces flics de chocs ont un vécu en commun, des liens forts les unissent et leurs permettent de se serrer les coudes tant en privé qu'au beau milieu de leurs affaires policières... ou criminelles. Car ces gars-là font plus que flirter avec les voyous qu'ils traquent, ils franchissent plus souvent qu'à leur tour la ligne jaune et trempent dans toutes sortes de trafics (le ton étant vite donné dès le premier épisode où ils abattent un de leur collègue soupçonneux).
Tout au long de ses 7 saisons, la série suit un schéma assez classique, ascension, réussite et chute libre.
Pourtant The Shield est tellement plus que ça.
Outre la brigade de choc, le show présente une galerie de personnages secondaires traités avec grand soin (un duo d'inspecteurs, un flic en uniforme, une fliquette en uniforme et leur capitaine) et dont les storylines valent parfois autant que la principale. La série saura aussi en introduire d'autres au fur et à mesure de son avancée (certains "grands" noms venant parfois les interpréter, Glenn Close, Forrest Whitaker).
Le casting, à quelques exceptions près, est de qualité, même chez les débutants ou les visages moins connus.
La réalisation, nerveuse, se tient en gros sur deux principes. D'abord une caméra à l'épaule quasi-permanente (surtout en extérieur) et des plans fixes aux points peu habituels. Ensuite le montage, presque brutal, permet l'augmentation de la tension et des ruptures de tons parfois cinglantes.
L'ambiance sonore renforce l'immersion dans ce quartier sous-tension et la musique du générique elle-même tend les nerfs ce qu'il faut pour bien nous mettre dans l'ambiance.
La très grande force de la série est son écriture, et notamment celle de ses personnages, dépassant tous les stéréotypes qu'impliquent les séries policières plus généralement. Ici, bien et mal se confondent, s'entremêlent, échangent leurs positions. Tous ce petit monde est plus humain que manichéen.
Michael Chiklis, je le répète, tant sa performance est indissociable de la grande qualité de la série, est magistral.
Une série excellente, dont l'évolution, de série policière à tragédie grecque, ne peut mener qu'à un final déchirant, amorcé de longue date (depuis le final de la saison 5 de mémoire un peu floue).
Must Have Seen.