Entre l’emphase léchée du cinéma de Guadagnino et la veine cauchemardesque du chef de file de l’elevated horror Ari Aster, Zoé Kravitz livre avec Blink twice une peinture dégénérée de l’Amérique post Weinstein.
Blink twice est un objet étrange que l’on voudrait aimer faisant miroiter par son casting une certaine cinéphilie et un sens unique du melting pot hype. Qui peut se prévaloir de réunir des acteurs phares des années 80/90 (Christian Slater qui fût troublant et l’immense Geena Davis) avec deux ex mannequins, anciens strip-teaser pour Channing Tatum et ex-star du porno pour Simon Rex (incroyable dans Red Rocket) ?!
Ce choix n’est évidemment pas anodin. On sent derrière le luxe impitoyable et les masques fallacieux de la jet set au delà de la narcomanie, une fêlure profonde, une vanité mortifère propice aux comportements les plus déviants.
On voit bien que Zoé Kravitz tente la dénonciation des abus sexuels de l’ère me too version Hollywood et le énième degré à travers un film violemment bête.
Le talent n’est pas absent ni le mimétisme sonore d’un Midsommar. Mais il manque la complexité, l’ambiguïté subtile d’Ari Aster, son génial sens de la folie humaine dans un détail et un travail en amont sur les personnages.
Ici nous sommes à l’image du titre, obligés de cligner des yeux deux fois pour ne pas être consumés dans la force du cliché, l’aplatissement généralisé du gros plan censé créer du climax, l’abrutissement optimal du scénario. Toutes les îles de la tentation ou perversion jusqu’à la série Wilds y passent, régurgitées au blender branché et nous finissons par nous sentir voyeurs d’une violence graphique pauvre en sens, symptôme d’une humanité inepte.
Pour voir une vraie réflexion esthétique et aigüe sur les violences, l’emprise et les décadences, allez plutôt jeter un coup d’œil et cligner des yeux trois fois devant la sidérante série (avortée par les scandales et critiques) de Sam Levinson The Idols sur le torture-porn de l’industrie Hollywoodienne.
Pour les amateurs c'est par ici,https://www.lemagducine.fr/cinema/critiques-films/blink-twice-film-2024-zoe-kravitz-avis-10070465/