Considéré longtemps comme l'un des films les plus violents et les plus brutaux jamais réalisé, Cannibal Holocaust (1980) a pâti d'une réputation sulfureuse, combinée à de nombreuses légendes, qui lui ont interdit le succès qui aurait du être le sien, mais qui pour ses fans lui confère le statut finalement pas si commun de film culte.
Détruit par une censure plus encline à vouloir moraliser l'art qu'à vraiment protéger les spectateurs, Ruggero DEODATO passa plus de temps à prouver que ses acteurs n'étaient pas morts ou à se justifier sur le gore de son récit qu'à réellement promouvoir son oeuvre.
Il est temps de réhabiliter ce film, qui est l'un des meilleurs traitant d'un sujet aussi extrême, le cannibalisme. Mais au-delà de ce thème certes rebutant et dérangeant, le film dénonce surtout les agissements de quelques reporters, qui oubliant les élémentaires réserves ethnologiques qui doivent les astreindre lorsqu'ils filment ou documentent des peuples étiquetés "primitifs".
Un petit groupe de quatre documentalistes habitués des reportages chocs et des lieux périlleux s'enfonce dans la jungle amazonienne à la rencontre des dernières tribus cannibales, leur disparition poussera une équipe de sauvetage à partir à leur recherche, cette dernière découvre les images tournées et constate l'horreur.
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, ce ne sont pas les membres des tribus qui se montrent les plus barbares, mais bel et bien ces quatre occidentaux, qui transgressent toutes les limites, s'adonnent aux comportements les plus bestiaux, pratiquent tortures et viols dans l'unique but d'alimenter leur documentaire, jusqu'à ce que les "primitifs" décident d'y mettre un terme et de se faire justice.
Effectivement certaines scènes sont d'une rare violence, et la mise en scène et les prises de vue naturalistes concourent à rendre le film difficile pour un public non averti. La scène du dépeçage d'une tortue vous laissera un goût désagréable dans la bouche et même habitué, je la déconseille durant un repas. Les scènes de cannibalisme sont également dures, mais le malaise le plus grand réside bel et bien dans les comportements des étrangers venus là pour satisfaire un vil instinct de voyeurisme pour alimenter un public occidental en images chocs.
La morale est sauve, car devant l'abject, les producteurs ne peuvent se résoudre à les diffuser.
Je trouve que ce film est une vraie réussite, tant dans sa réalisation, que dans son extrémisme et sa violence, un film de niche, à réserver à un public amateur de cinéma brutal et choc, mais qui mériterait une meilleure réputation.