Qu'il eut été magnifique ou raté, je serais forcément sorti de « Coup de chance » avec un pincement au cœur : en effet, il est quasiment certain que celui-ci sera le dernier de Woody Allen (et en français, s'il vous plait!), et me dire, malgré l'homme discutable qu'il est (son avis sur l'affaire Rubiales-Hermoso était... dispensable), que c'est sans doute la dernière fois que je me rends en salles obscures pour découvrir sa nouvelle œuvre me fait quelque chose. Cela ne sera pas un chant du cygne : « juste » un charmant polar ni captivant, ni déplaisant : si la première partie est relativement réussie, la seconde tire plus en longueur, sans toujours parvenir à se renouveler, même si le cinéaste sait toujours ménager ses effets et ne laisse jamais rien totalement au hasard (oh, un coffret d'Hitchcock en DVD!).
Une fois de plus dans un film français, je n'ai pas trouvé le son très bon (et pour le coup pas l'impression que la diction des acteurs soit fautive!!), le cinéaste new-yorkais ayant déjà été plus inspiré niveau répliques savoureuses et piquantes, même si quelques-unes sortent du lot (notamment celle (même s'il n'était pas nécessaire de l'évoquer deux fois) sur le miracle de la vie tant nos chances de naître sont en réalité infimes). Le scénario aurait sans doute pu être plus complexe, ambigu, « mystérieux », notamment dans les intentions de Jean. Quant aux décors parisiens, ils étaient exploités avec autrement plus de magie dans « Minuit à Paris », tandis que la lumière française ne semble pas inspirer plus que ça le très grand Vittorio Storaro. Sans oublier les habituels (nombreux) troisièmes rôles, interprétés par des visages célèbres n'ayant pas grand-chose à défendre (Elsa Zylberstein en tête), représentants d'une bourgeoisie superficielle adeptes du scandale et des ragots.
Avec tout ça, vous me direz que ce 6/10 paraît bien généreux ! C'est vrai... Même si ce n'est pas toujours subtil, Allen garde toujours quelques atouts dans son jeu, si bien que le récit nous propose quelques surprises et fausses pistes, dont une ne trouvera son sens que lors de la toute dernière scène
(où l'adage deviendrait plutôt « qui va à la chasse perd... sa vie! »).
Le « Coup de chance » du titre se révélera ainsi à double tranchant, triste et gai : Woody Allen, en somme, dont l'intrigue peut autant évoquer « Match Point » (en nettement moins bien) que « Scoop » (en moins bien). Et puis il y a Lou de Laâge (Melvil Poupaud n'est pas mal non plus en mari pour qui la fin justifie largement les moyens) : élégante, lumineuse, charmante : elle est le vrai atout de cette « comédie dramatique policière » manquant d'épaisseur, mais avec cette petite « Allen's touch » lui permettant de se faire une (petite) place au soleil, à défaut d'irradier l'année 2023. Salut l'artiste.