Au vu la très bonne réputation du film de Tavernier, je ne peux qu'avouer ma déception devant cette farce très noire au ton décalé, loin d'être sans intérêt mais pas à la hauteur de sa renommée.
Adaptation transposée dans l'Afrique coloniale française du roman noir de Jim Thompson "Pop. 1280", "Coup de torchon" raconte le parcours sanglant d'un policier lâche et corrompu, qui subit le mépris constant de son entourage et de ses administrés, et qui finit par se rebeller au cours d'une épopée christique meurtrière.
Bertrand Tavernier, auréolé des succès de "Que la fête commence" et du "Juge et l'assassin", signe une œuvre dérangeante, particulièrement sombre et pessimiste, mais dont la tonalité caustique, quasi burlesque, désamorce en grande partie la violence.
La caractérisation des personnages est à ce point excessive (à l'instar du gradé campé par Guy Marchand) que ceux-ci paraissent presque irréels, et l'irruption de cette violence n'a pas l'impact escompté : on n'y croit pas vraiment...
Malgré tout certaines séquences fonctionnent mieux que d'autres dans ce registre de la brutalité froide et de la fureur malsaine, à l'image de l'exécution de sang-froid du pauvre serviteur africain soumis à ses maîtres, et dont l'incrédulité face au sort qui l'attend parvient à émouvoir.
Bertrand Tavernier fait étalage de ses qualités de cinéaste, avec une écriture inégale mais acérée, portée par une mise en scène efficace et signifiante, à l'image de la scène de danse finale, où le spectateur est littéralement pris dans le tourbillon du travelling circulaire.
Reste également le plaisir de retrouver, autour du grand Philippe Noiret, une galerie de seconds rôles pittoresques, tels que Jean-Pierre Marielle, Gérard Hernandez, Michel Beaune, Jean Champion, Stéphane Audran ou encore Eddy Mitchell dans un rôle étonnant.
Par ailleurs, j'ai compris pourquoi je n'ai jamais été sensible au charme d'Isabelle Huppert : même âgée de 20 printemps, c'est à mes yeux un vrai laideron, une vilaine petite rouquine qui semble pourtant faire fantasmer son monde. Les goûts et les couleurs...