Les frères Dardenne, je les avais laissé sans regret après "Rosetta", leur première Palme d'or, tant leur style social âpre et contemplatif m'avait ennuyé et déprimé à l'époque.
Quinze ans plus tard, Rosetta est devenue Sandra, héroïne malgré elle de "Deux jours, une nuit" (2014), et le changement est appréciable pour le spectateur, même si les deux jeunes femmes sont de grandes actrices, la question n'est pas là.
Sans renier leur veine sociale et leurs thématiques de prédilection, les frangins belges proposent un long-métrage au style moins épuré et moins pessimiste, à travers cette histoire parfois caricaturale quant au droit du travail, mais indéniablement émouvante. Ils parviennent surtout à éviter l'ennui, malgré la répétition inlassable des mêmes situations, voire des mêmes mots, grâce à leur mise en scène et aux réactions toujours différentes des collègues de Sandra.
Marion Cotillard y est très convaincante, au milieu d'acteurs belges inconnus ou amateurs. Elle incarne parfaitement cette jeune mère dépressive, pour qui se battre pour son emploi est devenu trop difficile...
C'est d'ailleurs la morale du film : accepter de lutter, c'est déjà s'en sortir.
Un bémol toutefois au niveau de l'interprétation, concernant le jeu sans nuances du mari, incarné par le belge Fabrizio Rongione, un habitué des Dardenne, qui ne fait pas le poids en face de la belle Marion.
Au final, en dépit de ses maladresses, "Deux jours, une nuit" se révèle une œuvre marquante et un film utile, susceptible de questionner chaque spectateur sur son propre degré d'humanité.