L'introduction, assommante d'exposition, fait craindre le pire. Client de Star Wars et de Peter Jackson, qui en font des caisses à ce sujet, je suis pourtant matraqué d'information de manière fort peu digeste. Une planète désertique, des indigènes dépeints comme barbares, des maisons qui font avancer leurs pions pour une ressource indispensable au voyage stellaire, l'épice. Pourtant, Villeneuve a le temps (2h30) et ne délivre ici que la première moitié de son diptyque. Symptomatique de son cinéma, qui ne fait confiance ni à ses images ni à son spectateur.


Pour résumer mon avis sur le bonhomme : j'ai trouvé Incendies surestimé mais intéressant, Prisoners reste pour moi son meilleur long, Enemy se perdait malgré une foultitude d'idées, Sicario passé un ennui poli avait deux séquences réussies et a délivré une suite passionnante, Premier contact m'a fasciné sur certains aspects mais passait à côté du cœur émotionnel de son récit, BR 2049 a signé ma rupture avec lui en voulant dévoyer un chef d’œuvre plutôt que chercher sa voie, heureusement sauvé par sa photo. Je ne partais donc pas très emballé, d'autant plus après avoir lu le roman d'Herbert, qui délivre une œuvre très ésotérique, aux multiples facettes, avec un aspect très organique. Je ne le juge pas à l'aune de ce qu'il n'est pas, à savoir le Dune maudit de Jodo (sûrement pour le meilleur) ou le remake du bancal Lynch (qui conservait des idées passionnantes). Par ailleurs, je ne suis pas un détracteur des designs, qui se veulent plutôt crédibles, à défaut de réalistes, et montrant un monde (et malheureusement pas un univers) industrialisé à l'extrême.


Quand le film fait justement confiance à ses décors, ses designs, sans rajouter trop de verbe, il s'envole et semble prendre son rythme de croisière. Très étiré, le temps accordé aux personnages commence à payer. Sans surprise, l'épice est simplifiée, réduite à sa dimension marchande, à peine du pétrole amélioré. Exit, ou presque, la dimension transcendantale, La dimension éminemment politique de l’œuvre est réduite à un GoT simplifiée où différentes familles s'affrontent pour les faveurs de l'empereur. On arrive plus vers un film de vengeance qu'une oppression d'un peuple martyrisé pour ses ressources souterraines qui va pousser à un jihad. Paul semble davantage aller vers un Lawrence d'Arabie, mais Villeneuve n'étant pas Lean, la sublimation des espaces comme la projection vers un destin exceptionnelle ne sont pas palpables.


Les influences de deux des meilleures œuvres de l'imaginaire de la décennie passée ont été ingérées mais pas totalement digérées. Avatar pour cette arrivée du complexe militaro industriel dans un monde peuplé d'indigène qui n'est pas fait pour lui, et Mad Max pour cette vision post apocalyptique d'un désert -cette tempête finale souffre ô combien de la comparaison avec l'introduction de Fury Road - où on se bat pour sa survie et une ressource trouvable en milieu hostile. Au jeu de la comparaison, Villeneuve est évidemment perdant avec les deux maîtres. Incapables de délivrer l'effet de sidération et le ludique d'un Cameron, très loin de l'aspect sensitif et fou de Miller. C'est pourtant tout ce qu'on attendait d'une adaptation du magnum opus d’Herbert.


Pourtant, il est indéniable que j'ai passé un bon moment, mais le lendemain du visionnage de l'adaptation d'un tel monument, j'ai du mal à avoir plus en tête que certaines images (la première apparition du ver des sables, le premier vol de libellules, une scène où -oh surprise- on voit un corps nu et où perçoit la fragilité de la chair comme dans une peinture de David). Les scènes d'action, trop rares, manquent de génie. Ainsi, même le spectateur venu pour passer un moment pop-corn devant un blockbuster n'en aura pas pour son argent.


Le pire étant l'assassinat de Leto, pourtant joué par mon chouchou Isaac, filmé de loin, entrecoupé de flashs avec son fils et sa concubine. Aucune éomotion de ce qui devrait être le drame initiatique de Paul.
Le Baron Harkonnen, lui, n'inspire pas la terreur (peut-être le PEGI 13 ?) que Villeneuve voudrait lui insuffler. Sa volonté de rester au loin d'éléments fantastiques -on l'aperçoit en train de voler mais toujours coupé- l'empêche de sublimer ces moments.


Reste un casting incroyable, mais souvent mal exploité : les personnages de Momoa et Brolin sont des duplicatas qu'ils ne sont pas censés être, Zendaya est sublimée et fantasmée comme elle peut l'être mais sa première apparition est décevante. Surtout, on se rend compte qu'une fois toute la folie d'Herbert retirée, plutôt qu'être sublimée comme le voulait le projet de Jodo, on se retrouve avec un film qui manque d'âme, un bête voyage du héros campbellien, bien exécuté. Pas déshonorant, mais pas à la hauteur.

Boris_Biron
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le 16 sept. 2021

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Boris_Biron

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