Cela restera une vraie question pour moi : ai-je eu raison de revoir la version de David Lynch seulement quelques jours avant celle de Denis Villeneuve ? Ce qui me semblait être une bonne idée sur le coup m'a paru nettement moins pertinente en sortant de la salle tant j'avais les grandes lignes du récit en tête. Qu'en aurais-je pensé avec un regard « neuf » ? Je ne le saurais jamais. Forcément plus émerveillé, surpris par un univers n'ayant pas d'équivalent depuis bien longtemps. J'insiste longuement sur cette « frustration » car ce mauvais (?) choix de ma part a forcément eu une influence sur une critique qui aurait été inévitablement différente.
Une fois cela écrit, « Dune », c'est quand même un sacré spectacle. Il m'a fait un peu la même impression que pour « Blade Runner 2049 » : c'est un peu froid, les protagonistes ne suscitent pas la passion, j'espérais sans doute plus d'intensité dans le récit. De plus, j'ose à peine l'écrire mais quelques rares aspects m'ont paru plus convaincants dans la version de 1984 : quelques explications un peu plus claires, une poignée de personnages plus développés (quitte à les avoir rendus presque ridicules (Brad Dourif, pour ne citer que lui)) : au moins ce revisionnage n'aura pas été totalement négatif.
N'empêche, alors que Lynch n'avait jamais su trouver le ton adapté pour cette « œuvre monde » pleine de bravoure, de courage et de sacrifice, l'affublant parfois d'un humour improbable, rien de tout ça ici tant Villeneuve a su donner toute sa grandeur, sa puissance à cet univers ample, démesuré, exploitant merveilleusement des décors d'une rare beauté (on aurait même aimé s'y plonger plus longuement), l'incroyable travail sur la photo comme sur le son offrant une immersion comme peu de films ont su nous en offrir ces dernières années.
Ces 155 minutes sont ainsi passées à une vitesse soutenue, heureux d'avoir pu vivre une vraie belle expérience, ce splendide voyage, n'évitant pas un certain manichéisme et une vision assez réductrice des femmes, enrobé de culture religieuse orientale tout en portant un regard complexe, intelligent aussi bien sur l'avidité des hommes que l'écologie.
Côté casting, aucune fausse note, certains sortant toutefois du lot : Oscar Isaac n'a jamais été aussi classe et en impose comme rarement, Jason Momoa est la divine surprise pour ce qui, me concernant, est sa plus belle prestation, Stellan Skarsgård est un baron Harkonnen renvoyant à des années-lumières celui campé par Kenneth McMillan, tandis que ma demande en mariage pour Rebecca Ferguson est plus que jamais d'actualité : je me demande même si elle n'est pas tout simplement en train de devenir mon actrice contemporaine préférée.
Enfin, au moins le deuxième volet (en espérant vraiment qu'il verra le jour!!) devrait-il plus me surprendre dans son déroulement puisque le récit
s'arrête à peu près aux deux tiers de la version originelle (grand bien lui fasse tant ce final était complètement naze, bâclé),
preuve d'une production infiniment mieux pensée, plus riche et respectueuse de la saga signée Frank Herbert : si les accusations en « manque d'émotion » resteront, celui d'artiste digne des plus grands noms du septième art ne devrait plus être contesté. L'aventure, la vraie !