Voilà un film qui m’a toujours laissé une impression mitigée. D’un côté, le sujet ne manque pas d’intérêt et l’interprétation est remarquable ; de l’autre, le traitement est tellement caricatural qu’il finit par desservir son sujet. Il faut dire que pour ce film Yves Boisset n’y va vraiment pas avec le dos de la cuillère. Les Français moyens (et la charge est facile) en prennent pour leur grade, le racisme ordinaire est éreinté, la politique est égratignée et même ce brave Léon Zitrone a droit à son petit traitement de faveur. Si le résultat est efficace, nombreux sont les moments où on peut trouver que la charge est trop rude pour être honnête. Et c’est sûrement là où le bât blesse.
La beaufitude est montrée sous toutes ses coutures jusqu’à l’écœurement : vacances au camping, plages bondées, conversations étriquées pour esprits étriquées, bal musette, délits de faciès, phrases toutes faites, apéritifs entre amis, et tout ce qui va avec. Yves Boisset abuse tellement des clichés et des lieux communs qu’il vient un moment où on se dit qu’il n’est pas possible qu’ils soient tous aussi cons. Davantage de personnages plus nuancés auraient certainement rendu l’escalade de la violence plus imprévisible. Là, tout est écrit d’avance. Parce que celui-ci est raciste, parce que celui-là est un faux-jeton, parce qu’un tel est un bourrin. Il y a trop peu à sauver de ces personnages-là pour que le propos fasse sens.
Après, bien entendu, c’est aussi le film d’une époque qui dénonce des travers qui, pour beaucoup, n’en étaient pas forcément. Le visage d’une certaine France se fait jour même si elle trop simpliste. Plus encore que Jean Carmet qui est toujours excellent, Pierre Tornade est réellement prodigieux dans son rôle de père un peu paumé. Michel Peyrelon est un détestable fielleux mielleux. Jean Bouise campe un inspecteur de police qui, même s’il s’en offusque, participe aussi au bal des faux-culs. Un film coup de poing où chaque personnage est là pour taper sur quelqu’un ou quelque chose. C’est aussi la limite le plus souvent des films à charge. À force de cogner, ils pèchent par excès.