Film de guerre antimilitariste réalisé par André de Toth en 1968. Alors que traditionnellement le cinéma britannique est plutôt consensuel avec son armée et son Histoire, ce film montre un aspect très déplaisant de la guerre. Des héros sans héroïsme, qui tirent la couverture à eux, à tous les échelons.
Comme dit le colonel Masters (Nigel Green), "la guerre c'est criminel, je la fais avec des criminels". Il va donc utiliser sans vergogne et sans états d'âme les gens qu'on lui confie pourvu qu'ils servent ses intérêts. D'une mission plus ou moins bidon qui tourne au fiasco, il n'hésitera qu'à peine à trahir le commando en le vendant à l'ennemi. Son seul centre d'intérêt est l'archéologie des guerres puniques et leur possible application à la guerre qu'il est en train de faire. C'est vain.
Mais son chef lui-même, le général Blore utilise Masters, dont il méprise la dégaine si peu "british", parce que ça peut améliorer les statistiques…
Mais sous les ordres de Masters, ce n'est pas mieux, Nigel Davenport, ex officier dans les panzers, ex taulard, ex bien des choses, est d'un cynisme époustouflant et ne roule que pour lui-même.
Quand à Michael Caine, officier planqué dans un dépôt pétrolier, il s'occupe à jouer aux échecs – en morse - avec un autre joueur sur un bateau dans la rade. Le dilettante parfait pour qui la guerre, faut la faire parce qu'on est obligé mais sans trop se faire remarquer. En fait, il perdra vite ce dilettantisme puisqu'il reprendra en main le commando malgré tous les croche-pieds vicieux tendus par Davenport. En fait, il comprend très vite que s'il veut survivre il ne faut pas qu'il fasse ami-ami avec Davenport, comme probablement l'ont fait les précédents officiers tués "inopinément", mais au contraire il n'a d'autre choix que de se poser en chef. Il gagnera sa crédibilité par la compétence qu'il montrera. Il est choqué par le cynisme des personnes de l'équipe mais fera avec.
La mentalité des soldats, plus ou moins repris de justice civile et militaire, ne vaut pas mieux. Témoin la tentative de viol sur l'infirmière allemande qui ne se laisse pas faire et qui échoue grâce au blessé qu'elle a soigné. Lequel blessé a reçu un éclat de mine alors qu'il était en train de dépouiller un cadavre de soldat…
Le film baigne dans un humour noir, décapant, tendance anarchisant, où la solidarité du groupe n'existe pas sauf si elle devient vitale. Les subordonnés passent leur temps à observer leurs chefs et ricanent quand l'action se termine par un échec. Le commando va assister sans un geste, avec un lâche soulagement, au massacre brutal d'une colonne anglaise.
Le film commence très fort avec Davenport qui ramène un officier mort au camp dans une jeep avec la radio beuglant "Lili Marlène" en zone allemande et une chanson anglaise à l'approche du camp anglais. L'action restera sous tension pendant tout le film pour se terminer de façon extrêmement brutale, dans le mépris total des personnages du film. Je ne crois pas avoir vu beaucoup de films où les héros se démènent pour survivre pendant tout le film et mourir bêtement à la fin.
Pas d'acte d'héroïsme, pas de rachat, pas de compassion : à la fin le général et le colonel Masters se congratulent autour d'un whisky parce que l'armée de Montgomery a bien avancé et que ça les arrange, bien que leurs propres actions, leurs propres morts n'aient servi strictement à rien …
Ce film est un chef d'œuvre montrant l'horreur et la vanité de la guerre comme l'a été à peu près à la même époque "la colline des hommes perdus". Les héros c'est ceux qui survivent. On oublie ceux qui meurent même si c'est eux qui ont permis aux héros de survivre.
Le titre original colle mieux (notion de saleté et de jeu) au film que le titre français plus racoleur et moins signifiant.