Je voulais voir "Furyo" depuis des lustres. Le pitch me faisait penser au "Pont de la Rivière Kwaï", et en plus le casting me faisait rire (non mais sérieusement : David Bowie et Takeshi Kitano en face à face, ça se voit pas tous les jours). C'est le genre de film dont - malgré des critiques pas non plus faramineuses - je sentais bien que j'allais l'aimer. D'autant plus que le nom de Nagisa Oshima n'est pas étranger à mon oreille et qu'il a réalisé nombre de films japonais importants, à défaut d'être réussis, des années 70.
Beaucoup crient au scandale pour la traduction de nombreux titres de films américains (oui, bon, ce film n'est pas américain mais le titre est anglais), surtout que la comparaison du titre en langue de Molière a parfois peu à voir avec la version originale de celui-ci. D'habitude, à ce genre de remarques, je réponds clairement que je m'en contrefous de la traduction, sous acides, de titres par des mecs payés probablement pour trouver quelque chose d'accrocheur pour rameuter le plus de spectateurs en salles (la barrière de la langue, tout ça). Mais dans le cas de "Furyo" je ne comprendrais jamais pourquoi avoir viré le titre original "Merry Christmas, Mr Lawrence" vraiment classouille par un truc aussi terriblement insipide que "Furyo" (nom donné aux prisonniers de guerre par les japonais) qu'il ferait presque penser au nom d'un groupe de rock bas-étage s'exposant dans les pires bars miteux du Massif Central.
Passons. Ça ne concerne pas vraiment l'oeuvre au final. Pour en revenir au film, j'ai d'ailleurs été plutôt déçu. "Furyo" n'est pas mauvais, c'est même plutôt sympathique (surtout que le film est vraiment so gay, j'ai rarement vu un métrage balancer un sous-texte aussi homosexuel sans aucun complexe), mais je pense que j'avais fixé de trop grosses attentes dessus. La première heure m'a bien amusé, Kitano est juste énorme, de même que Tom Conti... mais dès l'arrivée marquée de David Bowie dans tout ça, "Furyo" perd en rythme, mais surtout en humour, qui faisait réellement sa force dans le début du film. Pas déplaisant, surtout que Bowie s'en sort bien, mais on en vient rapidement à remarquer que les meilleures scènes du film sont celles qui rassemblent Kitano et Conti.
Pour être le plus franc du monde, je me suis ennuyé mortellement pendant une bonne demi-heure avant de retrouver mon intérêt pour les vingts dernières minutes (et cette scène finale très réussie). C'est d'autant plus dommage que la qualité de certaines scènes dramatiques et certaines scènes plus légères sont vraiment réussies, mais "Furyo" hésite malheureusement bien trop souvent entre les deux genres. On passe du tragique au comique sans réelle transition, et là où certains cinéastes réalisent ça avec beaucoup de talent, ici ça bloque complètement. On notera une bonne bande-originale en plus de ça.
"Furyo" n'est pas déplaisant, mais très loin d'être aussi marquant qu'un "Pont de la Rivière Kwaï". A voir avant tout pour ses acteurs, et pour leur réunion, que pour un script qui patauge trop au milieu du film. Il y avait moyen de mieux faire, c'est dommage.