J'étais resté sur Danse avec les Loups de Kévin Costner, la Guerre de Sécession et ses soldats à bretelles ou cette chasse aux bisons.
Nul doute que Scorcese en a fait un digne successeur avec Killers of the Flower Moon, sur la question du génocide des indiens en Amérique. Une sorte de western-guérilla ce coup-ci, qui le rapproche de Gangs of New York. J'ai fortement aimé le contexte fertile, qui montre sous un autre angle les indiens de l'air moderne. Fairfax est ainsi un eldorado pétrolifère dans l'Oklahoma, la tribu indienne Osage est devenu richissime en exploitant ces terres d'or noir au début du 20ème siècle. C'était sans compter sur l'arrivée des Blancs, qui vont se faire une place en ville comme de la vermine et assassiner un maximum d'Osages propriétaires des lieux. Empoisonnements, alcoolisme, exécutions, complices, Scorcese s'est salit les mains encore une fois.
Tout est question d'héritage et de manipulation, le film est d'une violence psychologique terrible. La tension est de mise, on sert l'accoudoir du siège au cinéma. Musicalement, la country de Robbie Robertson est presque silencieuse pour atténuer la gravité des faits. Les soufflements d'harmonica annoncent des meurtres d'indiens devenus banals. Non, ce n'est pas la longueur des 3h30 du film qui pose problème, le rythme est d'ailleurs quasi parfait. Où j'ai moins de quiétude, c'est le dernier tiers du film. Oppenheimer de Nolan avait les mêmes défauts cet été. Lorsque qu'elle s'attaque au procès, la réalisation patine un peu, alors qu'elle avait déjà exposé les faits la deuxième heure du visionnage. Bien que j'ai un penchant pour Scorcese, je le met à la même hauteur que Nolan sur ce cru 2023 (7/10). La technique est maîtrisée de toute part, mais l'aspect justicier freine la dernière appréciation avant de quitter la salle.
La triplette d'acteurs principaux a son va-tout avec la paire d'As Di Caprio-De Niro, mais j'ai surtout un penchant pour Lily Gladstone qui représente le martyre du peuple Osage. C'est la pépite de Scorcese et les nombreux figurants indiens sont marquants (Ana, Henry etc...). Dans son rôle de mafieux certes habituel, De Niro est également très bon et fourbe. Telle une vieille vipère imbougeable sous son rocher, il a tout compris au système et sympathise faussement avec les locaux depuis longtemps. Di Caprio m'a beaucoup moins enjaillé, un air de bourru déjà emprunté et moins maîtrisé. Je pense qu'il a voulu joué un nouveau type de personnage au plus haut point fou et stupide, mais sa performance n'atteint pas celle de Shutter Island et Loup du Wall Street. Il y a certaines incohérences, son avidité pour l'argent est délaissée à l'écran. L'histoire d'amour si brillante un temps, a mal choisit sa fin également.
Scorcese se montrera à la hauteur de son synopsis, grâce à ses soins méticuleux et une caméra aussi discrète qu'habile. Son œuvre est très plaisante et très sérieuse quant aux éloges. D'un chouïa, elle manquera simplement le tir pour une vraie consécration totale dans l'ultime baroud d'honneur.