Un film de Martin Scorsese sorti en 2023 de près de 3h 30, qu'on ne voit pas passer tellement on est pris par cette histoire dramatique qui s'est déroulée en Oklahoma au sein d'une réserve d'indiens Osage, il y a à peu près une centaine d'années.
Pour une fois que les amérindiens ont la chance dans leur malheur d'être confinés dans une réserve qui se révèle être une éponge remplie de pétrole, il faut que des aigrefins trouvent le moyen d'épouser des indiennes pour s'en débarrasser et hériter de leurs terres et des dividendes correspondants. Il suffisait juste d'y penser.
Le propos de Scorsese est fort intéressant et me semble prolonger le genre cinématographique qu'est le western (le vrai, le western américain, hein !). Au début, les westerns évoquaient les pionniers déferlant dans l'ouest pour s'y installer éventuellement au détriment des indiens. À ce moment-là, la loi est inexistante ou pire, c'est la loi du plus fort. Puis, les choses se normalisent et l'ordre se met en place avec des lois au moins locales sinon régionales. Nombre de westerns montrent cette évolution enfantée souvent dans la douleur. Là, dans ce film, les lois sont bien en place mais sont appliquées localement avec les dérives liées aux intérêts d'une catégorie de gens au pouvoir au détriment d'une autre. Les meurtres - surtout s'il s'agit d'indiens – sont sommairement analysés.
C'est parce que certains indiens font appel au président des Etats Unis pour signaler ces crimes qui restent impunis que la police fédérale vient enquêter et, finalement, résoudre ces affaires. Bien entendu, ce n'est pas le premier film qui aborde ce genre de sujet (l'autorité fédérale qui surclasse l'autorité locale) mais ce film est bien dans la continuation de l'évolution du western.
Pour finir, notons le grand respect de Scorsese dans sa description des indiens, de leurs traditions et de leur désarroi devant une situation qui leur échappe peu à peu.
La mise en scène est extraordinaire. Il est inhabituel de voir des indiens devenus riches vivre sur un grand pied et l'effet est très réussi. L'image est très belle avec parfois des effets très efficaces et très troublants. Comme l'émergence soudaine du pétrole ou encore l'effet de l'incendie derrière une vitre. Et je ne parle pas de l'image finale qui est si riche de symbole (non, je ne dévoilerai pas de quoi il s'agit).
La conclusion est assez subtile. Habituellement, le sort ultérieur des protagonistes est simplement décrit à travers un texte qui défile. Ici, il est raconté à travers une sorte de spectacle un peu burlesque. Sur le coup, j'ai trouvé ça moyen ou en écart avec le reste du film. Puis en en discutant et en y réfléchissant, ça a du sens dans la mesure où ce qui se passe après la fin du film fait partie de la roue de l'Histoire qui tourne avec ses surprises, ses déconvenues, ses réussites …
Je n'ai pas encore parlé du casting prestigieux où on trouve un De Niro, surnommé "King", manipulateur dans un rôle maléfique et parfaitement odieux. Magnifiquement avide et méprisable.
Leonardo Di Caprio, quant à lui, endosse le rôle d'un neveu de "King", homme limité intellectuellement, facilement manipulable, complètement sous l'influence de son oncle. Superbement indigne et pathétique !
Mais l'actrice qui tire complètement son épingle du jeu, qui dégage une émotion considérable, c'est une certaine Lily Gladstone. Que je découvre avec un grand plaisir. Qui a un regard et un sourire éblouissants. Que j'aurais bien aimé voir un peu plus dans le film. D'ascendance indienne, elle transcende son jeu et a une présence incroyable d'autant qu'elle parle relativement peu. Tout est dans son regard.
Film très riche et très intéressant. Bel hommage de Scorsese aux indiens Osage. Belle découverte qu'il me faudra trouver en DVD pour le découvrir en VO et le déguster tranquillement …