Totalement invraisemblable et calibré pour apparaître "cool", "Kiss Kiss Bang Bang" n'en demeure pas moins une comédie policière sympathique et divertissante. Mais n'est-ce pas la définition même de l'univers de Shane Black?
Le scénariste star dans les années 90 passe pour la première fois derrière la caméra, et signe un long-métrage délirant et excessif, cocktail improbable aux ingrédients bien dosés : polar échevelé, comédie transgressive, romance décalée et violence décomplexée.
"Kiss Kiss Bang Bang" - une expression péjorative désignant le cinéma très commercial - se situe comme son nom l'indique à la limite de la parodie et du second degré. Le discours méta-filmique est matérialisée par la figure du narrateur, incarné par Robert Downey Jr, de retour en pleine forme après une période de vaches maigres. Celui-ci brise régulièrement le quatrième mur, sans parvenir à justifier pleinement ce procédé, qui tient plus du gadget, mais contribue à donner au film un certain cachet.
Dans ce récit peuplé de personnages déjantés, Shane Black accorde un soin particulier à ses héros, relativement atypiques et indéniablement attachants.
Downey Jr prend un plaisir communicatif à jouer les losers au coeur gros comme ça, embarqué dans une sombre affaire qui ne cesse de lui retomber sur la courge, pour les beaux yeux de Michelle Monaghan, actrice ratée et girl next door "attachiante".
Je ne fais pas partie des grands fans de la comédienne, mais ce rôle lui convient à merveille, d'autant que Black n'oublie pas de glisser la petite scène sexy qui va bien, au cours de laquelle Monaghan est déguisée en Mère Noël muy caliente.
Enfin, pour compléter ce tandem d'enquêteurs amateurs, il fallait un professionnel, un vrai : en l'occurrence un détective homosexuel surnommé "Gay Perry", auquel Val Kilmer prête avec talent son physique massif et son sens de la dérision.
On le voit, "KKBB" ne manque pas d'atouts pour séduire, et je ne suis pas surpris du succès d'estime dont bénéficie le premier film de Shane Black.
Le seul problème (le mien, en tout cas), dans ce genre de récit décousu et frénétique au cours duquel tout peut arriver, c'est justement que chaque péripétie "incroyable" se trouve désamorcée par le contexte, et on finit pas ne plus être surpris comme on le devrait, à l'instar d'un "Very bad trip", par exemple, qui souffre du même syndrome.
Autre reproche : le visuel du film est assez vilain, avec une réalisation et une photo terriblement ancrées dans le début des années 2000, qui évoquent l'esthétique d'un vidéoclip.
On se consolera de ces lacunes, et on ne boudera pas notre plaisir, car des films capables de proposer des personnages bien construits, des gags délirants et des punchlines percutantes autour d'une intrigue policière plutôt solide, ça ne court pas les rues à l'heure actuelle...