L'auberge rouge

C'est toujours avec amusement que je regarde ce film que j'avais vu il y a longtemps à la télé, que j'avais enregistré en cassette VHS et que j'ai maintenant en DVD. Avant d'écrire cette critique, je suis allé parcourir wikipedia à propos du titre et suis tombé sur une petite surprise.

En effet, comme tout le monde, j'étais certain que le film s'inspirait de l'affaire de l'auberge de Peyrebeille, d'autant que la chanson "la complainte du voyageur" au générique la mentionne explicitement. Voilà-t-y pas que "l'auberge rouge" c'est aussi le titre d'un roman de Balzac (que je ne connais pas) où il est question d'un crime crapuleux commis dans une auberge (qui plus est, commis par le père de Victorine Taillefer qu'on retrouve dans le père Goriot…). Mais non, fausse alerte, Autant-Lara a en fait renoncé à adapter le roman de Balzac pour se rabattre sur l'affaire de Peyrebeille. Est-ce que le titre en est un reliquat ?

L'auberge de Peyrebeille est située sur un plateau ardéchois au sud du Puy. Je l'avais visitée quand j'étais gosse puis avec les enfants lors de vacances en Ardèche. Bon, pour faire bonne impression, il est recommandé de la visiter en hiver, par temps venteux et sous la neige. Comme je l'ai toujours vue en été, c'est nettement moins drôle d'autant que l'auberge est aussi un restaurant …

Le scénario du film s'arrange avec la véritable histoire en la noircissant un peu plus et surtout en lui donnant un ton qui se veut un peu plus satirique avec un humour noir prononcé. Il y a un petit côté anti-clérical qui n'est pas vraiment pour me déplaire. Le moine, joué par Fernandel, ne fait preuve d'un grand courage que pour taxer les voyageurs afin de pouvoir profiter d'un bon repas. La foi a bon dos pour parvenir à ses fins.

Les bons voyageurs bourgeois sont pas mal dans le genre profiteurs et égoïstes qui donnent un petit air de "Boule de Suif" sans la prostituée mais avec un solide et pauvre bûcheron.

Mais, ce que j'apprécie bien dans le film, c'est que le personnage de Fernandel est bien contrebalancé par d'autres acteurs férocement truculents comme Julien Carette et Françoise Rosay dans les rôles du couple d'aubergistes. Ça a évité à Fernandel d'en faire un peu trop.

La scène de la confession de Françoise Rosay à Fernandel est assez jubilatoire.

Lud Germain, acteur haïtien, joue le rôle du sympathique, poétique et inquiétant homme à tout faire de l'auberge, Fétiche, avec un certain brio et un vrai second degré. Je trouve ça plutôt amusant de la part d'Autant-Lara d'avoir introduit ce personnage un peu surprenant dans les années 1830 au milieu de nulle part en Ardèche.

Petit chef d'œuvre d'humour noir inaltérable…