Librement inspiré de la fameuse affaire "Elf", le sujet de Chabrol s'oriente vite vers le portrait de la juge du pôle financier qui instruit un dossier où la politique et la finance forment une nébuleuse classique, où les abus de bien social et les commissions sont la règle. Le film n'est pas précisément un polar judiciaire. Vague, imprécise, l'intrigue est un simple cas d'école de la délinquance financière dans les plus hautes sphères économiques. Le sujet est traité avec une certaine fantaisie et une légèreté qui émanent autant de la personnalité de la juge Charmant-Killman (à traduire en français) que du défilé dans son bureau de VIP et d'intermédiaires louches, invariablement indignés et arrogants, et soudainement piteux (François Berléand excelle dans ce registre).
Isabelle Huppert, comme souvent chez Chabrol, compose un personnage anticonformiste, détaché des conventions du genre, dans un mélange de volontarisme, d'impertinence et de fausse candeur (en revanche, les contingences domestiques avec son mari et son neveu sont d'un intérêt très relatif), qui donnent aux auditions de la juge une apparence cocasse. Cependant que l'ivresse du pouvoir est celle que ressent peut-être la magistrate lorsqu'elle convoque à loisir ou incarcère des potentats jusqu'alors protégés par l'impunité, plus prosaïquement par leurs relations et leur capacité de nuisance.