Après A trois on y va, le triangle amoureux est de nouveau à l'affiche sur les écrans français. Bien moins drôle mais tout aussi intéressant, L'ombre des femmes reprend l'histoire de Pierre et Manon. Tandis qu'ils travaillent ensemble et réalisent des documentaires, le mari commence à tromper sa femme. Mais, ce qu'il ne sait pas, c'est que celle-ci fait la même chose avec un autre homme.
Certes, le schéma de L'ombre des femmes ne peut être plus classique. Mais il est doté d'une puissance narrative indéniable. La justesse des dialogues, le réalisme des confrontations et la conviction des interprètes en font une histoire prenante, et tragique. Car un couple, au bout du conte, n'est pas fait pour durer. Un moment ou à un autre, une période de doutes et de lassitude s'installe dans ce quotidien intimiste. Difficile à combattre, cet obstacle peut s'avérer fatal pour les deux amoureux. Mais le couple que nous avons sous nos yeux, unique et faisant partie d'un tout, ne peut se dissoudre. C'est pourquoi il se reformera tôt ou tard. Peut-être pour reproduire les mêmes erreurs, ou peut-être pour créer quelque chose de neuf.
Ce noir et blanc brouille la perception du spectateur par rapport à la contextualisation du film. Les portables, ordinateurs et autres objets électroniques ont quasiment été bannis du script pour inscrire le scénario dans le passé. En plus de rendre cette histoire universelle et presque atemporelle, Garrel ajoute un brin de nostalgie mélancolique à l'ensemble (le couple fait un documentaire sur un héros de guerre). Il filme une passion usée, triste et destructrice qui semble inéluctable. Cette poésie urbaine issue de la Nouvelle Vague, renforçant la théâtralité de l'œuvre, accompagne adroitement ces trois âmes en peine. Un beau film plein de tact.
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