La femme insecte (1963) - にっぽん昆虫記 / 123 min
Réalisateur : Shōhei Imamura - 今村 昌平
Acteurs principaux : Sachiko Hidari - 左幸子 ;
Mots-Clefs : Japon - Drame - Ethnographie - Prostitution.
Le pitch :
Au début du 20éme siècle, Tome nait à la campagne dans la pauvreté la plus totale. Décidée à changer sa condition et à connaitre la fortune par tous les moyens, elle part pour la ville. Dans ce contexte, la jeune femme va vendre son corps et entrer dans le milieu de la prostitution. Quarante années d'une vie en miroir des mutations du pays.
Premières impressions :
Il y a quelques mois je vous parlais de « Cochons et cuirassés », œuvre de jeunesse de Shohei Imamura qui m’avait laissé un peu sur ma faim avec son histoire de gangsters donnant dans la contrebande de porcs. Cette déception ne m’a toutefois pas freiné dans ma découverte des œuvres du réalisateur deux fois primés par la palme d’or. Et j’ai eu drôlement raison de persévérer car « La femme insecte » est un film exceptionnel.
C’est que le film retrace un demi-siècle de la vie de Tome, de sa naissance à l’asymptote de sa destinée, puis à sa perte. Cependant, plus que la vie d’une femme prostituée puis mère maquerelle, ce sont les profonds bouleversements au sein de la société japonaise qu’Imamura met en scène. Les difficultés rencontrées par Tome et la façon dont elles les surpassent sont autant d’allégories de la façon dont le Japon a su se relever de l’impérialisme, mais également une sérieuse critique envers une certaine déchéance consumériste.
La perte des valeurs nippones qui était déjà un thème central dans « cochons et cuirassés » se retrouve largement ici. Pour autant Imamura ne pose aucun jugement sur ses personnages. Ni apitoiement, ni glorification. Lorsque les temps son durs, chacun fait ce qu’il faut, sans que cela soit nécessairement la bonne chose à faire. Imamura pose une vraie distance entre le film et ses personnages, presque à la façon d'un documentaire, et j'ai adoré cela. Mon côté sociologue sûrement.
Côté acteurs, le film est également une franche réussite. L’actrice Sachiko Hidari réussi à jouer à la perfection les différents âges de la vie de Tome. Il suffit de quelques instants, d’un regard, d’un soupir pour que l’on comprenne tout le cheminement du personnage. J’y ai crû à chaque instant. Le film n’a d’ailleurs pas besoin d’explications outre mesure car tout est là, dans l’image, le cadrage, le jeu. Peut-être est-ce parce que Shôhei Imamura a fréquenté ce monde plus qu’un autre. Il y a du réel dans sa vision. Une certaine forme de contemplation par la distance est déjà bien ancrée.
Je conseille donc vivement « la femme insecte » à tous les amateurs de films classiques et aux cinéphiles de tous poils. Les amoureux de films brainless n’y trouveront probablement pas leur compte. La nouvelle version disponible en DVD et BlueRay est dans une qualité d’image exceptionnelle.