Certains films sont souvent précédés par leur réputation. C'est le cas de "La Folle Escapade". Bien qu'encore méconnu en francophonie, dans les pays anglophones, ce film est un incontournable. Il aurait traumatisé des générations d'enfants, laissant leurs parents dans l'incompréhension à une époque où, encore plus qu'aujourd'hui, les dessins animés étaient considérés comme "exclusivement pour les enfants". Le synopsis laisse présager un petit road trip au pays des lapins, véritables petites peluches vivantes, alors que le film est en réalité bien plus sombre. Il est brutal, offre une vue plus que réaliste sur le monde animal, et c'est sans doute de là que vient toute sa brutalité.
L'ouverture, qui introduit les spectateurs à toute une cosmogonie lapine, ne tente pas de nous leurrer : le Dieu Soleil, Frifth (VO), créa le monde et ses habitants, dont les lapins. Suite à un affront de la part du Prince des lapins envers Frifth, ce dernier décide de le punir en rendant hostiles aux lapins un certain nombre de créatures. Le chien, le chat, la belette, le renard et l'oiseau de proie se mettent à les chasser et à les dévorer . C'est le début des relations entre proies et prédateurs. "Le monde entier sera ton ennemi, Ô Prince aux mille ennemis. Et lorsqu'ils t'attraperont, ils te tueront.", dit Frifth. Néanmoins, il décide d'offrir aux lapins quelques avantages pour pouvoir échapper à leurs prédateurs."Mais ils devront d'abord t'attraper!". Ainsi commence La Folle Escapade, et du même coup, la lutte perpétuelle des lapins pour leur survie. On est loin d'un Bambi où l'Homme est l'ennemi de La Nature, dans laquelle tout le monde est gentil et ami.
Néanmoins, l'Homme a son rôle à jouer dans la Folle Escapade, même si, comme dans Bambi, nous ne connaîtrons jamais son identité, ni ne verrons son visage. Nous entendrons tout de même sa voix et connaîtrons ses pensées, dans une certaine mesure. Il est tout d'abord l'élément déclencheur du voyage, lorsque Fiver (VO), un lapin, pressent un danger sur la garenne dont il fait partie. Fiver est connu pour avoir des visions, et lorsque deux hommes quittent la garenne en abandonnant une cigarette, l'odeur de celle ci permet à Fiver de comprendre que ce danger est réel, et anéantira la garenne et tous ses habitants. Aidé par son grand frère, Hazel, Fiver tente de faire comprendre au Chef Lapin que la garenne doit être évacuée, mais le Chef ne veut rien entendre, et ordonne à sa milice d'arrêter tout déserteur éventuel. Malgré l'oppression, un petit groupe de lapins décide de braver les interdits, et tandis qu'ils s'enfuient dans la nuit, la caméra nous permet de voir que les deux hommes mentionnés plus haut ont installé un panneau près de la Garenne. "Immeubles en construction". Le pressentiment de Fiver est confirmé pour les spectateurs, la garenne va disparaître sous peu...
Je ne donnerai pas plus d'informations sur l'histoire, dans le but d'éviter de spoiler. Je dirai juste que l'aventure de ce groupe de lapins sera riche en rebondissements, en luttes et en combats pour la vie et la liberté, elle sera brute mais parfois allégée par des touches d'humour, apportées par Kehaar l'oiseau. Si ce film n'est pas à mettre devant tous les yeux, il est à voir au moins une fois dans une vie. L'animation est magnifique, allant du simpliste pour l'ouverture au réaliste pour l'histoire en elle-même, en passant même par le graphique pour la scène de flash back que je ne détaillerai pas ici, sans nul doute la scène la plus puissante de tout le long-métrage. La musique, dont la chanson "Bright Eyes", chantée par Art Garfunkel, est de toute beauté, et l'histoire est originale et prenante. Par contre, la version française de France est peu flatteuse pour l'oeuvre, en tant que lectrice du livre original, j'ai trouvé les traductions plus que bancales. A voir donc en VO ou en version française du Québec, beaucoup plus réussie.
En bref: Une véritable oeuvre d'art pour tout le monde, mais pas à tout âge.