L'histoire d'un homme qui travaille après le travail. Avec d'autres hommes, il prépare des briques près d'un barrage, à partir de la boue du fleuve. Et le soir, il emprunte une moto, s'engouffre au milieu des montagnes et bâtit autre chose, une chose à soi, à partir de ce qui lui est à la fois familier et commun : cette boue de tous les jours et dans laquelle il baigne, et pour laquelle il oeuvre sans fin. Autre chose qu'une brique : un monstre, qu'on entend peut-être gronder, fragile, prêt à s'effondrer à la première pluie. Un monstre, ou bien la liberté. Une liberté possible.
Ali Cherri fait monde avec peu et tout semble grand : une blessure dans le dos, une route droite, un chien qui observe depuis les falaises. Il y a beaucoup d'énigmes dans son cinéma, des références aussi (Weerasethakul/Tarkovski/Tsai-Ming-Liang), des trucs qui semblent un peu exagérés parfois, pourtant jamais d'emphase, et des idées nombreuses, comme s'il n'était jamais à court d'imaginaire. Ca donne un film avec des profondeurs, chargé, intense, abstrait, qui se prête aussi bien à l'interprétation qu'au rêve. Un film qui cherche les superpositions et les correspondances plutôt que les effets. Donc un film poétique.