Le début inquiète : si celui-ci est mené efficacement, il n'en est pas moins lourdaud et caricatural, à l'image de ces deux « ex » tout droit sortis de Guignol. Heureusement, ce duo de parasites est nettement plus discret par la suite et nous permet d'apprécier à sa juste valeur ce réjouissant « Sauvage ». Jean-Paul Rappeneau s'y connaît niveau rythme et c'est un bonheur que de voir un film défiler aussi rapidement, le tout agrémenté de pas mal d'idées, de répliques savoureuses et de situations réjouissantes.
On s'étonnerait presque que cela fonctionne aussi bien tant l'évolution du scénario peut parfois surprendre, à l'image des révélations concernant Martin. À ce moment de l'œuvre, il n'y a en effet quasiment aucun moyen de deviner une telle « machination », et pourtant on y croit, le réalisateur parvenant à rendre étonnamment crédible ce revirement. Il est d'ailleurs à noter que si « Le Sauvage » est avant tout une comédie, celui-ci nous offre quelques vrais moments dramatiques, à l'image d'un dernier tiers que l'on aurait là encore difficilement pu imaginer.
C'est aussi cela, la force du film : nous faire passer par plusieurs émotions, parfois en très peu de temps, voire une seule réplique. Reste que les plus formidables scènes se déroulent incontestablement sur l'île, où Yves Montand et Catherine Deneuve, « emmerdeuse » aussi sublime qu'irrésistible, se livrent à un mélange d'affrontement et de séduction jubilatoire, assurément un grand moment comique. Bref, une œuvre en perpétuel mouvement, ode salutaire au voyage, à l'amour et à la vie : malgré quelques couacs, un régal.