À défaut de conseil, la nuit porte sans doute des gants à clous
Les guerriers de la nuit est ce qu'on appelle communément un western moderne.
Il est en cela bien plus intelligent qu'il ne peut y paraître au premier abord.
Sans s'encombrer d'artifices patauds, notamment dans sa mise en place, le pitch est celui d'une traversée de la ville. Rien de bien palpitant a priori.
Tout le talent réside dans les embûches qui guettent nos aventuriers, et l'organisation par "boss" successifs qui, si elle n'est pas sans rappeler Scott Pilgrim, l'utilise de façon bien plus convaincante et moins frénétique.
Les pérégrinations des différents groupes sont claires, l'ensemble est d'une fluidité et d'une lisibilité admirable, le tout entrecoupé par les interventions de l'animatrice radio, dont la voix suave contraste avec les propos assassins qu'elle profère, et ce côté narrateur dépersonnifié autorise une fois encore le réal à aller à l'essentiel dans son récit, ce qui profite véritablement à l'histoire proprement dite ainsi qu'au decorum.
Privilégiant parfois la forme au fond, Hill met à profit cette trame très simple, voire simpliste, pour raconter ce qu'il veut vraiment : ces affrontements de gangs, dans une ville claustrophobique et notamment ses trains de banlieue.
Les plans de nuit, somptueux, accompagnent à merveille la musique à pleine sonorité eighties (ou bien est-ce l'inverse ?) en une excellente symbiose, permettant au spectateur de suivre sans effort le périple des jeunes Warriors, réussissant à les rendre sympathiques malgré le contexte.
En effet si la totalité des protagonistes sont finalement des voyous de plus ou moins grande envergure, ce sur quoi se penche l'objectif de la caméra c'est bien les idéologies diverses portées par les gangs rivaux, dont on a ici un panel sans doute caricatural mais en tout cas vraiment diversifié et toujours très "juste".
Bémol cependant à la grognasse qui se greffe à nos héros, d'une plastique très douteuse et à la personnalité guère plus reluisante.
Bien sûr l'esthétique d'ensemble a un peu vieilli, mais d'une part la nuit atténue le phénomène, d'autre part cela achève de donner cette teinte particulière aux films de ces années.
À aucun moment cela ne m'a gêné pour plonger des deux pieds.
Grand merci donc au petit Thieu, à qui je confesse humblement qu'avant le retour très positif de ma pandette, je soupçonnais de m'avoir mis entre les pattes un petit nanard de derrière les fagots, enfant illégitime d'une alliance improbable entre West Side Story et Street Fighter (oui, c'est l'image que j'en avais, et je suis fort aise d'avoir eu tellement tort).