Ce qui frappe d'emblée dans cette version ciné de la célèbre série télévisée, c'est la mise en scène flamboyante de Brian de Palma, qui fait honneur aux moyens financiers colossaux dont il a bénéficié.
Déjà, la reconstitution des années 30 se révèle magnifique : entre les bagnoles d'époque, les décors superbes et les costards signés Giorgio Armani, sublimés par une photo élégante, on se sent vraiment transporté au temps de la Prohibition - certes idéalisée par Hollywood et donc un peu artificielle.
Surtout, la caméra de De Palma apparaît virevoltante. Le réalisateur multiplie les longs travellings et les plans-séquences, avant de proposer plusieurs morceaux de bravoure dans la seconde moitié du film : l'interpellation à cheval façon western à la frontière canadienne, ou encore la célébrissime séquence de la poussette dans les escaliers de la gare, au beau milieu d'une fusillade dantesque...
Si l'aspect formel est une belle réussite, on ne peut hélas pas en dire autant du fond de cette œuvre manichéenne, qui cumule quelques défauts gênants.
A commencer par son héros gentillet à la psychologie simpliste, campé par un Kevin Costner assez insipide, dont le physique lisse et le charisme douteux évoquent davantage un gendre idéal qu'un flic de haute volée. Les quelques scènes familiales avec la peu séduisante Patricia Clarkson sont des sommets de mièvrerie teintée de patriotisme et de sens du devoir.
Pour le sexy et le glamour, on repassera...
A ses côtés, les autres "incorruptibles" s'en sortent mieux : Sean Connery le vétéran, Andy Garcia le rookie tireur d'élite et Charles Martin Smith le comptable binoclard forment une belle équipe complémentaire.
En face, affublé d'un début de calvitie du meilleur effet (chapeau à l'équipe de maquillage), Robert De Niro excelle dans son interprétation d'un Al Capone cabotin, arrogant et ultra-violent.
On remarquera aussi la "sale gueule" de Billy Drago, l'exécuteur des basses œuvres de Capone.
Une autre faiblesse du film tient à son intrigue, finalement assez basique et sans grande surprise, et jalonnée de quelques trous scénaristiques (d'où Malone tient-il ses tuyaux, par exemple?) et invraisemblances (l'inversion de jury finale)...
"The Untouchables" est donc avant tout un spectacle hollywoodien, dont le potentiel se trouve transcendé par un cinéaste au sommet de son art, offrant à ce polar une ampleur et un souffle qui en font un classique (mineur) des années 80.