J'avais adoré « Amanda » du même Mikhaël Hers, c'était donc avec une réelle attente que je me suis dirigé dans les salles obscures pour découvrir « Les Passagers de la nuit » (très beau titre, un hommage au film de Delmer Daves?). Et... il y a une légère déception. Certes, ma note montre que j'ai globalement apprécié, ce qui est le cas. Mais l'état de grâce constant dans lequel baignait son œuvre précédente est ici plus intermittent. Côté satisfaction, le visuel. Cette photographie ouatée, pouvant déconcerter au départ, nous plonge constamment dans un grand réconfort, doux et chaleureux, parfaitement adaptée au propos et à l'époque.
Cette même époque, suivant la victoire de François Mitterrand et l'explosion des radios-libres, est décrite avec sensibilité, à la fois lointaine et proche, un peu hors du temps, peut-être trop. Il y a une évidente délicatesse, notamment à travers l'écriture des personnages, l'élégance de certaines situations, la volonté de les rendre touchants sans chercher à les idéaliser superficiellement, Charlotte Gainsbourg y trouvant l'un de ses plus beaux rôles.
Côté déception, la narration. J'ai eu trop souvent l'impression d'une suite de scènes, à peu près cohérentes entre elles mais sans véritable liant, les ellipses apparaissant parfois un peu brutales d'une scène à l'autre. Certaines sous-intrigues sont clairement plus intéressantes que d'autres, où l'on voit souvent un beau potentiel pas totalement exploité, à l'image des passages à la radio, dont on regrette la discrétion tant elles sont formidables, à l'image de l'énigmatique présentatrice, très élégamment interprétée par Emmanuelle Béart. Enfin, loin d'être omniprésentes, quelques scènes intimes aussi longuettes qu'inutiles, comme si Hers cherchait à se « conformiser » au cinéma d'auteur français actuel.
Dommage. Reste un réalisateur et une œuvre très au-dessus de la moyenne, dont on sort plutôt touché, mais aussi frustré de ne pas vu toutes les promesses annoncées précédemment.