Claude Lelouch n'a jamais eu peur des grands sentiments ni du ridicule : il fallait bien ça pour faire revenir (une seconde fois) les personnages de son plus beau film : « Un homme et une femme ». Et je dois vous avouer que même plusieurs jours après, j'ai toujours du mal à me faire une opinion précise. D'un côté, le réalisateur a, presque comme toujours, tendance à se voir plus beau, plus talentueux qu'il n'est, nous pondant quelques dialogues lunaires, des scènes régulièrement trop longues et, surtout, ayant beaucoup de mal à cacher qu'il n'a pas tant de choses à dire, sans parler de choix musicaux pour le moins douteux (je pense évidemment à Calogero, s'étant surpassé dans les trémolos pour l'occasion).


Les (nombreuses) archives du film original semblent ainsi souvent là pour combler un scénario limité, usant de moyens parfois discutables


(le coup du rêve, une fois OK, deux c'est trop, accentuant au passage l'impression de vide laissée par moments),


l'ami Claude ne se foulant pas souvent côté mise en scène, à l'image d'omniprésents champs-contrechamps. Et pourtant... Même si tous ces défauts ont été un réel frein à mon plaisir, je ne peux m'empêcher de trouver un réel charme à ces « Plus belles années d'une vie ». Discret, sans doute, mais réel. Lelouch a toujours été un bon conteur, et malgré ce fond faiblard, il parvient à quelque chose de touchant, sensible, assurément maladroit, mais délicat.


Si je continue à me demander s'il n'aurait pas été mieux de les laisser sur ce fameux quai de gare il y a maintenant 53 ans, revoir Jean-Louis Trintignant et Anouk Aimée sans le moindre artifice, perdus entre leurs souvenirs et cette fin de vie si proche, peut difficilement laisser de marbre. Lui a été beaucoup moins épargné qu'elle (cette élégance... magnifique), mais sa diction, sa présence sont intactes


(la lecture du poème est vraiment un joli moment)


pour ce qui sera très probablement sa dernière apparition sur grand écran (je sais que l'on dit ça depuis sept ans et « Amour » mais là, quand même!).


Et bien qu'elles prennent quasiment la moitié de l'œuvre, les images « anciennes » sont bien choisies, dont quelques minutes de


la célèbre traversée de Paris la nuit réalisée en 1976,


s'incorporant avec une certaine aisance dans le montage. C'est toutefois dans l'implicite que le film est peut-être le plus intéressant : ce regard sur la vieillesse, assez loin des banalités d'usage, n'épargnant pas les deux héros et


les empêchant inexorablement de vivre leur amour une dernière fois


est souvent très juste et bien montré. Bref, vous l'aurez compris : du pour et du contre dans ce 49ème (!) Claude Lelouch : la possibilité de se moquer est réelle, mais il n'est pas non plus interdit de sortir avec un sourire (triste) après ce dernier rendez-vous avec des personnages aimés. Parfois, la nostalgie peut faire des miracles.

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le 9 juin 2019

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Caine78

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