Dans ma petite Suisse, il n'est guère simple d'observer le fameux lynx, le fantôme des bois. Alors que j'observais un spécimen dans un zoo, un collègue à moi m'a dit en avoir vu un jour un, le temps d'une fraction de seconde. Le fantôme s'était envolé comme si de rien était. On m'a même souvent dit que le lynx avait vu plus d'humains que d'humains ne l'avait vu. Une bête mythique quasi impossible à observer et que je ne verrais probablement jamais dans son royaume, l'immense forêt aux milles cachettes. C'est là qu'entre en jeu le film de Laurent Geslin.
Lynx est un film très particulier à mes yeux car il m'a profondément ému uniquement avec sa bande-annonce. Forcément, visionner l'oeuvre au cinéma a déculpé l'effet. Voir le mythique félin appeler une femelle depuis une corniche, juste devant mes yeux, c'est tout simplement magistrale. Une expérience que je n'aurais jamais crue vivre. Même si on ne voit pas le lynx lors d'une balade dans la nature, il est pourtant bien là : il pousse son cri étrange, s'accouple, chasse avec une terrifiante efficacité, élève d'adorables petits, inspecte son territoire, etc. Le réalisateur ne manque pas une miette de la vie du félin sans pour autant nous proposer un documentaire purement scientifique. Très peu d'informations techniques sont données, et ça fonctionne à merveille. Avec sa voix porteuse, Laurent Geslin nous conte l'histoire à la fois tendre et tragique d'un couple de lynxs vivant chacun de leur côté. Leur histoire est à la fois drôle, touchante, tragique, pleine d'espoir. A cela se rajoute une plétore d'animaux plus communs tels que des cerfs, renards, faucons, chamois, sangliers, chats sauvages, chouettes et j'en passe. Tous font ici des apparitions mémorables, souvent traitées avec beaucoup d'humour et de poésie grâce à un excellent montage racontant une histoire rien qu'avec les images et la musique.
Et soudainement, alors que débarque déjà la fin du documentaire, quelque chose d'incroyable se produit. Après tout le drame que le film nous a jeté à la figure, voilà qu'une lueur d'espoir apparait. Quelques minutes nous rappelant que le combat pour la survie du lynx est certes difficiles mais pas dénué d'espoir. Il y a une lumière au bout du tunnel. C'est là que l'inimaginable se produit : dans l'obscurité de la salle de projection, mes yeux se mouillent. Je pleure. Je chiale. Une chose qui ne m'arrive pour ainsi dire jamais devant un film.
Je quitte la salle, profondément ému, le coeur enchanté par ce que j'estime être le meilleur film de 2021 mais aussi l'un des meilleurs documentaires animaliers, mais aussi l'un des moments les plus magiques que j'ai vécu au cinéma.