Excellent ce Michel-Ange, très dense. On sort des sentiers battus par ce genre de film sur de grandes personnalités. Ici, on ne cherche pas à entrer dans les détails du génie de Michel-Ange, on ne cherche pas à l'expliquer. Le film nous monte plutôt comment l'artiste et l'homme sont dépassés par ce génie, voire même, à certains égards, dépossédés de ce génie.
On nous montre un Michel-Ange dépassé, paranoïaque, au bord de la folie, qui vit dans des conditions d'une grande précarité malgré les richesses passant dans ses mains. Nous n'avons pas là un homme se servant de son génie, mais presque un génie habitant le corps d'un homme pour exister. C'est assez passionnant de suivre cela. Et ça se sent dans la physicalité du personnage, par ses absences, ses errances.
Dépassé mais aussi dépossédé, parce que le film se penche beaucoup sur le contexte historique et les enjeux de pouvoir gravitant autour du génie de Michel-Ange. On voit que cela lui permet d'exercer du pouvoir sur son entourage, mais il est aussi soumis à ceux qui financent son œuvre. Il y a de forts enjeux symboliques de ce point de vue.
Enfin, ce qui m'a énormément plu, c'est que le film n'est pas dans la démarche de montrer le génie à l'œuvre, ou du moins très peu. On va surtout le voir dans un ouvrage collectif, nécessitant une force coordonnée. On voit avec ces séquences toute la dimension physique de la production (ici artistique) ainsi que la dimension collective montrant que le génie n'est rien s'il est pris isolément, que c'est la force du collectif (voire le sacrifice si l'on va plus loin) qui permet de valoriser le génie individuel.
Toute cette richesse est portée par une mise en scène des plus réussies, avec un travail de composition formidable plaçant Michel-Ange dans un environnement donné (parfois le noyant dans le cadre pour privilégier le contexte) et évidement cette photo divine.
(Critique écrite en mai 2021, au moment de la sortie du film.)