Je confesse ne pas avoir vu tous les films réalisés par Clint EASTWOOD, notamment Impitoyable (1992) ou Sur la route de Madison (1995), mais parmi ceux que j'ai vu celui-ci est sans doute mon préféré, suivi je pense par Mystic River (2003) ou son diptyque sur la seconde guerre mondiale formé par les excellents Mémoires de nos pères (2006) et Lettres d Iwo Jima (2006) tandis que j'ai plus de réserves sur American Sniper (2014) ou La Mule (2018).
De même que le premier Rocky (1976) prenait le prétexte de la boxe pour nous conter la force de la volonté d'un homme de petite condition à qui le destin offre la chance de sa vie, Clint Eastwood choisit lui aussi de placer son histoire dans le décorum et la symbolique de la boxe.
Incarnant Frankie Dunn, vieux soigneur, devenu propriétaire d'une petite salle de boxe, bourru et souffrant de ne pas avoir eu l'opportunité de conduire un boxeur jusqu'au titre mais surtout du rejet de sa fille, c'est un personnage dur qui n'attend plus rien de la vie, et qui subissant la trahison de l'ultime poulain qui aurait pu lui permettre de concrétiser son rêve semble se résigner.
Seul son confident et ami, Scrap, l'homme à tout faire qui le suit depuis des années et qui l'aiguille dans ses choix et le soutien arrive encore à le faire fléchir et à questionner sa conscience, parfois de façon directe, parfois plus subtilement, offrant à Morgan FREEMAN l'un de ces rôles de mentor qui lui sied parfaitement.
Leur monde fait de coups, de larmes, de sang et de combat se voit un jour bousculé par l'arrivée d'une jeune de femme Maggie, bien décidée à avoir Frankie comme entraineur pour conquérir son rêve de boxer. Hilary SWANK est bluffante de crédibilité dans ce rôle à la fois physique et tout en nuances, alternant avec beaucoup de charme les scènes dédiées au noble art et celles centrées sur l'à coté du ring.
Seulement pour Frankie, il est hors de question d'entrainer une femme, et il faudra toute la persuasion de Maggie et l'aide complice de Scrap pour le faire changer d'avis.
Les deux apprennent alors à se connaître, à s'apprivoiser, ils s'écoutent et lui tout en devenant plus proche de cette jeune femme aux blessures et aux fantômes du passé aussi lourds à porter que les siens, trouve une sorte de rédemption tandis qu'elle trouve un père de substitution ou tout du moins une figure paternelle qui la porte et lui redonne l'espoir. C'était deux être isolés, réunis désormais dans un même but, un même rêve.
Si les matchs sont leur lumière et leurs moments de gloire et de raisons de vivre, sitôt qu'il en sortent, la mise en scène et la photographie les plonge dans un perpétuel clair obscur, qui souligne non seulement la fragilité de leurs destins à eux deux, mais annonce le drame à venir.
Drame qui survient en pleine gloire, en pleine lumière comme un dernier pied de nez du destin et qui les plonge de façon définitive et cruelle dans les ténèbres.
S'achevant sur un dernier acte bouleversant et qui me tire des larmes à chaque fois que je revois cet absolu chef d'oeuvre, Eastwood à travers le noble art, convoque la noblesse des sentiments.
Admirable de maîtrise, de poésie et de dramaturgie un classique indispensable, qui mérite et sa réputation et ses éloges et ses récompenses.