La tarte aux myrtilles, c'est tellement bon qu'on en redemande...
Ce film a sans doute été le début du virus Wong Kar Wai...Ce n'est peut-être ni son film le plus caractéristique, ni son plus connu ni son meilleur, j'en étais bien consciente. Mais c'était mon premier, et les symptômes étaient là, c'est indéniable. J'ai aimé et j'aime encore en y repensant l'ambiance qui émane de ce film : on le regarde, on le vit de l'intérieur, et on s'y sent bien. La bande-annonce m'avait tentée, peut-être par son accroche un peu sentimentale qui laissait croire à une simple histoire d'amour devant laquelle on passe un moment sympathique. Il n'en est rien.
Ceci est bien plus fin, et bien plus beau que toutes les romances que les films se plaisent à montrer habituellement. Celui qui écrit qu'il ne se passe rien et que le film finit là où il devrait commencer n'a rien compris (et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il y en a beaucoup... !!!).
La reconstruction de Lizzie nous est parfaitement bien montrée, tout y est : le temps, le passe-temps, et les rencontres qui vont avec. Voulant oublier l'homme qu'elle aime, elle est amenée à croiser le chemin de personnes dont on ne verra, comme elle, que des tranches de vie : on se trouve ainsi un peu sans attaches, balancés ici et là, se baladant au gré de ses rencontres comme si elles étaient les nôtres. Les thèmes sont abordés de façon à ce que le spectateur n'en souffre pas, pour ne prendre qu'un exemple, la mort est présente à plusieurs reprises dans le film sans qu'on ait pour autant l'impression d'être plongés dans un drame.
(spoil ?) La relation entre elle et Jérémy est bien plus belle qu'elle le serait s'ils étaient proches tout au long du film. Et c'est là où c'est très fort, pas de réelle surprise quant au dénouement de l'histoire, mais le spectateur l'attend avec impatience, et s'en délecte plus que pour un happy end ordinaire. Et quand je dis happy end, c'est inexact car nous n'en savons rien, et c'est là que réside tout le charme... (fin du spoil ?)
Deux personnes qui tirent un trait sur leur passé, et qui gardent en mémoire cette rencontre qui a bouleversé leur vie au moment où ils n'étaient pas encore prêts à l'accepter. Ses recherches pour la retrouver à tout prix sont aussi belles que les lettres qu'elle lui écrit pour tout lui raconter. Et la confiance qu'elle place en lui malgré la distance est aussi merveilleuse que la foi qu'il garde en elle, sa conviction qu'un jour elle reviendra, et que ce jour-là il sera prêt à l'attendre.
Comment est-il possible de trouver cette relation fade et sans intensité ? Tout en suggestion et en non-dits (digne héritier d' In the mood for love), il me fait d'ailleurs cruellement manquer d'objectivité tant il correspond à l'opinion que j'en ai.
C'est assez magique d'avoir l'impression qu'au fond il n'y a pas vraiment eu de film. Quand on y réfléchit, plusieurs histoires apparaissent devant nous successivement, il n'y a donc pas la même continuité que s'il n'y en avait qu'une. L'impression qui en résulte est plus celle d'un « moment » que d'un film, tant on y prend part et on y accroche.
Je ne connaissais pas encore Wong Kar Wai, mais j'ai été très étonnée de trouver en My blueberry nights un de ses films, positivement étonnée, car même si je ne m'attendais pas à ça, c'était en fait bien mieux que ce que j'espérais. Je n'attendais plus qu'une chose : goûter à tous ses autres films comme à cette tarte aux myrtilles, d'une simplicité merveilleuse mais absolument succulente...