Hyper ancré dans les early nineties (marquées par les dégâts de l'ultra libéralisme à la mode Reagan), "New Jack City" est à la fois un film culte, un quasi nanar et une parodie de "Scarface".
Pour ceux qui l'ont vus et appréciés à l'époque de sa sortie, le premier film de Mario Van Peebles diffuse un shoot de nostalgie instantané, mais ceux qui le découvrent aujourd'hui n'auront sans doute pas la même indulgence.
En fait, le problème de "New Jack City" réside dans sa volonté de traiter de problèmes graves, mais avec une approche de pur divertissement - ce qui créée le malaise en plusieurs occasions.
Le meilleur service à lui rendre est donc de ne pas prendre le film trop au sérieux, et de se concentrer sur sa dimension parodique et distrayante.
On s'amusera ainsi du décalage induit par de nombreuses situations bigger than life (les dealers qui se réunissent en conseil d'administration, ou qui font exploser tout un immeuble pour détruire des preuves!), tout en fermant les yeux sur les énormités du scénario (Nino qui avoue incidemment le meurtre de sa mère à Scotty, le banquier Kareem qui reconnaît Scotty à l'instant crucial du deal, le choix de Pookie - junkie notoire - pour surveiller la fabrication de freebase...).
La vraisemblance et la rigueur ne sont visiblement pas les soucis principaux du réalisateur, qui propose en revanche une mise en scène très correcte, émaillée de scènes efficaces (la course-poursuite en ouverture, la fusillade après le mariage...), de petites trouvailles sympa (jeux d'ombres, angles de caméra originaux...) et de nombreuses références cinéphiliques - sans oublier la qualité de la bande originale.
Mario Van Peebles (fils de Melvin, l'une des figures de la blaxploitation) peut s'appuyer sur un casting hétéroclite mais excitant, comprenant la fine fleur des jeunes acteurs black de l'époque, à commencer par Wesley Snipes, convaincant en parrain de la drogue impitoyable.
On retrouve également le rappeur Ice T (au jeu encore trop limité), Allen Payne (idem), Chris Rock (cabot mais doué), Bill Nunn, ainsi que la charmante Michael Michele.
Sans oublier la présence surprenante de Judd Nelson ("Breakfast Club") pour la touche de buddy movie et de fraternisation black & white.
Voilà donc un film qui bouffe à tous les râteliers, mais le fait avec un certain panache.
Ainsi, même si le mélange des genres apparaît problématique, on apprécie l'ébauche de message politique diffusée par "New Jack City". Le film de Van Peebles est l'un des premiers à montrer concrètement les effets du crack sur les populations, et à proposer un discours sur les responsabilités de chacun face à ce fléau.
Cette dimension "engagée" n'est pas dénuée de maladresse ni d'opportunisme, mais apporte une certaine valeur ajoutée à ce divertissement efficace et sans complexe.