Moi aussi, je veux boire du sang
Comment (sur)vivre lorsque l’on a déjà eu plusieurs vies? C’est l’interrogation principal du nouveau film de Jim Jarmush.
Un peu comme dans l’immense Broken Flowers, une décennie auparavant où Bill Muray, déprimé, retraçait sa vie en cherchant ses anciens amours. Et également dans le très moyen Limits of Control.
Ici, pas d’homme dépressif.
Mais des vampires. C’est la grand idée du film, ils ont tout vécus, connaissent tout.
Adam musicien (dépressif) depuis plusieurs siècles, ami de Schubert et Byron, aujourd’hui rocker reclus dans une vieille bâtisse de Détroit, las de sa trop longue vie.
Comme dans la bible, Adam aime Eve, vampire elle aussi.
Eve, c’est Tilda Swinton, sublime dans les rues de Tanger, sublime dans les décors vides de détroit. Inquiète pour Adam le suicidaire, aux mauvaise fréquentations.
Ces vampires là ne tuent pas, ils se fondent dans la masse, et boivent du sang trouvé dans les hôpitaux.
Au milieu de la déprime d’Adam (Tom Hiddleston, toujours juste), apparaît Ava, soeur d’Eve, pétillante petite vampire, turbulente et inadaptée au 21ème siècle.
Porté par une BO envoûtante, le film progresse lentement, mais on ne s’ennuie jamais, captivés par ses deux immenses acteurs. Mais aussi par leur histoire et leurs vies antérieures.
Tels les deux particules chères à Adam, les vampires avancent ensemble, et Jarmush tisse un portrait atypique et émouvant, celui de l’infini, de l’amour immortel.
Il filme ces éternels amants, misanthropes, à travers des villes fantômes, tous deux nostalgiques des époques passées. Et petit à petit voient s’envoler leur idéal de vie. Bientôt, ils ne pourront plus contempler le monde et le temps passer, main dans la main. Car le monde se meurt, tout comme eux.